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l
Neurone
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Vol 18
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N°9
·
2013
brales (3, 4). En France, la scission entre
la neurologie et la psychiatrie a eu lieu
en 1968. D'autres pays européens n'ont
pas été dans cette direction, tels que l'Alle-
magne ou l'Italie, du moins pour cette
dernière, pour la neuropsychiatrie infan-
tile. En Belgique, le divorce entre les
deux disciplines a été consommé au dé-
but des années 1990 par la séparation
complète de la formation, aboutissant à
des diplômés en neurologie ou en psy-
chiatrie, manquant d'informations un
tant soit peu profondes sur l'autre disci-
pline. De plus, les neuropsychiatres qui
avaient été formés jusque-là sont depuis
lors «poussés dans le dos» par des déci-
sions voire des vexations administratives
(perte d'accès à certaines nomenclatures
accordées aux neurologues ou aux psy-
chiatres), pour les contraindre à se défi-
nir comme neurologues ou psychiatres!
L'administration y verrait un espoir
d'économie dans le coût des soins de
santé! Ceci reste à prouver, car il appa-
raît difficile d'utiliser au même moment
deux nomenclatures différentes et, en
outre, il existe d'autres moyens via la
performante informatique de révéler des
dérapages liés à d'éventuelles pratiques
malveillantes, voire des fraudes. Cepen-
dant, la Justice belge, entre autres, garde
la confiance aux neuropsychiatres en les
favorisant par un honoraire spécial, plus
élevé, car leur évaluation d'un dommage
corporel et psychologique, dans un seul
rapport, a une valeur ajoutée non négli-
geable: ceci économise du temps et de
l'argent par l'évitement de faire cette
évaluation en deux temps complémen-
taires et d'en faire une synthèse toujours
difficile si on n'a pas une vue d'emblée
globale!
Les intérêts d'une formation
mixte
Par contre, certains neuropsychiatres
continuent de défendre et de faire
connaître tous les intérêts d'une forma-
tion mixte, même si ceci ne veut pas dire
«50/50»: il est tout à fait compréhensible
que la formation doit être orientée vers
l'une ou l'autre des deux vocations, mais
des cours dans le domaine de la voca-
tion non préférée restent importants à
recevoir pour garder une vue d'ensemble
du diagnostic et de la prise en charge des
maladies neuropsychiatriques. Ceci est
tout à fait fondamental, car il existe de-
puis toujours ­ mais de plus en plus net-
tement avec l'allongement de la durée
des prises en charge, grâce aux traite-
ments plus performants ­ des symptômes
neurologiques en pathologie psychia-
trique et vice-versa, posant des problè-
mes diagnostiques (épilepsie temporale,
tumeur frontale, forme psychiatrique
d'une sclérose en plaques...) ou de
suivi, comme par exemple le syn-
drome parkinsonien ou encore sérotoni-
nergique d'origine médicamenteuse,
ainsi que l'apparition d'une composante
psycho-organique au décours d'une af-
fection psychiatrique. Par ailleurs, il peut
exister clairement des symptômes psy-
chiatriques dans certaines pathologies
neurologiques, par exemple dans les af-
fections neuro-dégénératives, de plus en
plus mixtes au cours de leur évolution,
vu l'apparition, outre les troubles mo-
teurs, de troubles dépressifs, d'hallucina-
tions, de démence avec des troubles du
comportement: les plus évidentes sont,
sans doute, les hallucinations, idées déli-
rantes et confusions du patient parkinso-
nien évolué.
Jeune neurologue, dans les années 1980,
j'ai été affecté entre autres à une unité de
géronto-psychiatrie pour y détecter des
pathologies neurologiques non évi-
dentes aux examens d'admission. A mon
grand étonnement, j'ai pu ainsi mettre
en évidence des pathologies neuropsy-
chologiques telles que des aphasies,
apraxies et/ou agnosies voire des épi-
sodes confusionnels d'étiologies variées
(surtout vasculaires, épileptiques ou mé-
taboliques) pour lesquelles l'imagerie
d'époque, le Ct-scan, n'avait pas montré
d'anomalie. Transférés dans le service de
neurologie, les patients pouvaient alors
bénéficier, après bilan approfondi, d'une
prise en charge spécifique, entre autres
par revalidation logopédique (orthopho-
niste), permettant généralement une
amélioration fonctionnelle et l'arrêt des
médications psychotropes. Ainsi, JR Ber-
ger, neurologue à Lexington (Université
du Kentucky), publie récemment (5) un
point de vue intéressant sur la disparition
progressive des compétences médicales
traditionnelles au pied du lit du malade:
«Les médecins, naguère, se faisaient fort
de détecter des anomalies sans avoir re-
cours à des examens radiologiques ou
invasifs...»
. Ceci s'entend bien entendu
au prix d'un temps plus long consacré à
l'anamnèse et à l'examen clinique du
patient. Bien sûr, les examens sont moins
invasifs et dangereux qu'auparavant,
mais on peut rétorquer qu'ils sont plus
coûteux, qu'ils ne montrent pas toujours
toutes les lésions ­ certaines restant non
visibles par les techniques actuellement
reconnues en routine, entre autres pour
des anomalies métaboliques ou des sé-
quelles traumatiques ni hémorragiques,
ni nécrosées ­, et enfin, certains exa-
Les médecins, naguère, se
faisaient fort de détecter des
anomalies sans avoir recours
à des examens radiologiques
ou invasifs.
Les difficultés diagnostiques sont dues entre autres
à l'impossibilité pour le patient de reconnaître ses propres
problèmes, surtout dans certains syndromes
de l'hémisphère droit.