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Neurone
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Vol 18
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N°9
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2013
d. les patients adressés en consulta-
tion pour douleurs rapportent da-
vantage de troubles de l'humeur;
e. la douleur reste le symptôme le
plus redouté par les patients cancé-
reux (1, 2).
Les point b, c et d s'appliquent égale-
ment aux patients cancéreux.
La reconnaissance et la prise en
compte de la détresse psychologique
sont des éléments majeurs dans la prise
en charge de la douleur chronique. De
façon empirique, trois aspects ont été
abordés de manière plus approfondie:
le catastrophisme (ensemble d'élé-
ments mentaux négatifs qui contri-
buent à une perception déformée et
anxiogène de la réalité, de soi et des
autres), le coping et la détresse émo-
tionnelle, sans oublier les troubles
sexuels, qui contribuent à une altéra-
tion de l'état psychologique.
Des interventions basées sur les compé-
tences (Skills-Based Interventions ­ SBI
­ qui sont des interventions de type co-
gnitivo-comportemental) et l'éducation
sont les plus souvent rapportées dans la
littérature.
Les SBI mettent l'accent sur la façon dont
les patients vont modifier leurs croyances
et leur interprétation par rapport à la
douleur en réduisant le catastrophisme
et les attentes négatives en matière de
traitement, et en proposant aux patients
des méthodes spécifiques telles que la
relaxation ou même l'auto-hypnose.
L'éducation des patients insiste davan-
tage sur les aspects pratiques (usage adé-
quat des médicaments) et la communi-
cation.
SS Gorin et coll. ont montré, dans une
méta-analyse portant sur plus de 1.600
études (dont seulement 37 ont été rete-
nues pour l'analyse) effectuées entre
1966 et 2010, que les SBI permettaient
d'obtenir de meilleurs résultats que les
approche éducatives mais qu'au final,
les différences étaient non significatives
(3). Toutefois, les auteurs précisaient que
des limitations méthodologiques ne per-
mettaient pas de tirer des conclusions
plus précises, d'autant que dans la plu-
part des études, les autres traitements
étaient rarement ou succinctement dé-
crits et que la période d'observation dé-
passait rarement les 6 semaines, ce qui
en termes de douleur chronique est
court. Cela étant, cette méta-analyse ap-
porte des arguments en faveur du déve-
loppement de ces techniques dans le
cadre du traitement de la douleur cancé-
reuse.
Coping et douleur
La définition choisie pour coping est
celle de Lazarus et Folkman: ensemble
des changements constants, à la fois co-
gnitifs et comportementaux, visant à
contrôler et à gérer les demandes spéci-
fiques qui peuvent dépasser les res-
sources de la personne. C'est aussi en
psychologie l'ensemble des processus
qu'un individu interpose entre lui et un
événement éprouvant, afin d'en maîtri-
ser ou d'en diminuer l'impact sur son
bien-être physique et psychique (4). On
pourrait utiliser l'expression «faire face»
ou «s'en tirer», ou encore «s'en sortir»,
mais pour des raisons pratiques, le terme
coping sera conservé pour éviter une tra-
duction hasardeuse. Les différentes stra-
tégies en matière de coping sont reprises
dans le tableau.
S'il n'y a pas dans la littérature de straté-
gies éprouvées, le coping en tant que tel
joue un rôle majeur dans l'appréhension
qu'ont les patients vis-à-vis de leur dou-
leur et des publications significatives
soutiennent cette assertion.
Interventions psychologiques
Une étude prospective a porté sur des
patients présentant des métastases os-
seuses recevant soit des soins dits «stan-
dard», soit bénéficiant d'interventions
psychologiques personnalisées (5). C'est
au sein du groupe bénéficiant d'interven-
tions que les résultats favorables sont ap-
parus de manière significative. D'autre
part, l'étude a permis d'identifier un sous-
groupe de patients chez qui il était néces-
saire d'intensifier les interventions psy-
chologiques: patients âgés et/ou présen-
tant des débilités ou des déficits cognitifs.
Dans une étude randomisée contrôlée,
menée sur 549 patients atteints d'un
cancer pulmonaire (6), un groupe de
patients était inclus dans un bras propo-
sant différents outils de mesure (douleur,
fatigue, etc.) ainsi que le CPC (Canadian
Problem Checklist
) et le second groupe,
outre les mêmes outils, se voyait propo-
ser un entretien personnalisé avec un des
membres de l'équipe de psychologues.
Les patients du second groupe rappor-
taient moins de problèmes de douleur,
de fatigue, de détresse, de problèmes
respiratoires et de conflits familiaux.
L'étude était limitée par la durée du sui-
vi, dépendant directement de l'espé-
rance de vie des patients.
S'intéressant au catastrophisme et au
contexte social de patients atteints de
cancer pulmonaire, Gauthier a montré
que ces éléments jouent un rôle majeur
dans les relations interpersonnelles (7).
Ainsi, l'aide ressentie de la part des
conjoints ou de tierces personnes (solli-
citude, distraction) ou, a contrario, le
sentiment d'une relation négative avait
1. Axé sur l'évaluation: adaptation cognitive. Exemple: déni.
2. Axé sur l'identification des problèmes: tout comportement qui vise à
réduire ou à éliminer les comportements de stress. Exemple: recherche
d'information, apprentissage de nouvelles techniques et/ou compétences.
3. Axé sur les émotions: modification des réactions propres en présence d'un
stress. Exemple: distraction, médiation.
Tableau: Principaux types de coping.