background image
64
l
Neurone
·
Vol 18
·
N°9
·
2013
un impact direct sur la douleur, la dé-
pression et le comportement face à la
douleur. Cette étude démontre non seu-
lement l'impact de l'environnement so-
cial, mais également du rôle joué par les
proches dans les stratégies d'adaptation
des patients.
Autres éléments pouvant
influer sur les aspects
psychologiques
Certains éléments, notamment des
troubles sexuels ou les relations intrafa-
miliales, indépendants des problèmes de
douleur ont néanmoins un impact
d'ordre psychologique qui peut influer
sur la perception de la douleur. Toute-
fois, il y a très peu d'études qui investi-
guent cet axe de recherche.
K. Milbury et H. Badr ont examiné les
liens entre les troubles sexuels, les symp-
tômes dépressifs et les schémas de com-
munication entre époux: construction
mutuelle (Mutual construction ­ MC) et
renoncement (Demand Withdraw ­
DW), dans le cadre de cancers du sein
métastatiques (8). Les troubles sexuels
sont directement corrélés à une sympto-
matologie dépressive tant chez la pa-
tiente que le conjoint. Les difficultés ren-
contrées étaient moindres en cas de
communication avec construction mu-
tuelle, suggérant qu'une approche ou-
verte et constructive des problèmes
d'ordre sexuel doit être proposée.
Même si l'évaluation de la douleur n'en
était pas l'objectif premier (qui était en
fait l'étude de la dépression), une étude
randomisée s'est proposé d'étudier l'im-
pact de l'hypnose sur la douleur chez
des patientes atteintes d'un cancer du
sein métastatique (9). Le groupe cible
recevait une information et des indica-
tions pratiques à propos de l'auto-hyp-
nose. Le but était de «ne pas lutter contre
la douleur, mais de filtrer la souffrance
en dehors de la douleur» ("not to fight
the pain but rather to filter the hurt out of
the pain
"). Les résultats étaient encoura-
geants mais les auteurs n'ont pas pu dé-
montrer la supériorité de la pratique de
l'auto-hypnose sur la durée et la fré-
quence de la douleur. De façon singu-
lière, c'est l'aspirine qui était l'antal-
gique le plus prescrit, et aucun opioïde
n'était repris dans la liste des médica-
ments.
L'implication des membres de la famille
dans le cadre d'interventions non médi-
camenteuses (exercices comportemen-
taux, travail sur ordinateur) est associée à
une amélioration de la santé mentale des
patients. C'est ce qu'a montré J.B. Hop-
kinson dans une revue extensive de la
littérature portant sur 23 études concer-
nant les interventions patients-familles
(10). La douleur n'était pas l'objectif pri-
maire, mais il ressort que cet item s'amé-
liore dès lors que la santé mentale s'amé-
liore. Il en allait de même pour l'anxiété,
la dépression et la détresse. Il est utile de
noter qu'aucune des 23 études ne parta-
geait le même design, ni les mêmes cri-
tères d'inclusion.
Une méta-analyse intéressante concer-
nant la musique (musicothérapie) dans
le cadre de soins a été publiée par J.M.
Zhang (11). Il est nécessaire ici de définir
ce qui se conçoit sous le vocable «musi-
cothérapie», qui renvoie à l'usage de la
musique à visée thérapeutique par une
personne spécialisée dans le domaine, à
la différence de la musique utilisée par
des soignants, sans formation spécifique.
La musicothérapie utilise les percus-
sions, le chant, l'écriture musicale, tout
élément qui permet de communiquer via
la musique. Notons que dans le cas
d'études faisant référence à un groupe
placebo, c'est le recours à des casques
n'émettant aucun son ni stimulus qui est
proposé. Il ressort de cette méta-analyse
que la musicothérapie améliore la symp-
tomatologie douloureuse de manière si-
gnificative (l'évaluation de la douleur se
faisant à l'aide d'échelles numérique et/
ou visuelles analogues), mais sans qu'il
soit fait mention d'une modification des
traitements appliqués. Chanter (chant
choral) apporte également un bien-être
et une diminution de la douleur perçue,
lorsque cette activité est pratiquée et par-
tagée par les patients et leurs soignants,
sans pour autant modifier l'état psycho-
logique des patients (12).
Bien que cela ne concerne pas directe-
ment les douleurs liées au cancer, cer-
tains auteurs estiment qu'il est parfois
nécessaire «d'accepter» une douleur
chronique qui ne pourra pas être com-
plètement contrôlée en promouvant des
stratégies axées sur les aspects fonction-
nels par un coping adapté, estimant que
cette attitude réduirait considérablement
les coûts liés au traitement (13). Cette
proposition pose question dans la me-
sure où il n'est pas précisé ce que sont
les critères pour définir ce qu'est une
«douleur qui ne pourra pas être contrô-
lée».
D'autres études ont été réalisées dans le
cadre d'interventions en pré-opératoire
de cancer du sein, utilisant des question-
naires concernant l'anxiété, la dépres-
sion, le catastrophisme et la douleur
(14), ou utilisant des enregistrements
d'exercices de relaxation (15). Ces tra-
vaux ont montré qu'une solidité («robus-
tness
») psychologique était associée à
une douleur post-opératoire moindre,
soulignant ainsi l'importance d'une
bonne évaluation psychologique avant
toute intervention afin de déterminer les
La reconnaissance et la
prise en compte de la
détresse psychologique sont
des éléments majeurs dans
la prise en charge de la
douleur chronique.
CLARIFICA
TION