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ortho-rhumato | Vol 9 | N°3 | 2011
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(fumée de cigarette, radioactivité, exposition excessive
au soleil, substances présentes dans l'alimentation...), de
petites inflammations peuvent par exemple apparaître et
contribuer, à terme, au développement de tumeurs. Diffé-
rentes infections ont également été associées à la survenue
de tumeurs, et certaines formes d'inflammation chronique
augmentent la sensibilité aux tumeurs.
Enfin, n'oublions pas le phénomène de l'inflammation in-
duite par un traitement. Une chimiothérapie ou une radio-
thérapie s'accompagnera en effet d'une inflammation sus-
ceptible d'accroître la réponse antitumorale, mais pouvant
également contribuer au développement d'une résistance
de la tumeur au traitement.
Le lien entre inflammation et cancer est donc complexe. Il
est évident que les deux phénomènes peuvent s'influencer.
La manière dont ils le feront dépendra de l'équilibre entre
une `mauvaise' inflammation (inductrice de tumeurs) et
une `bonne' inflammation (immunité antitumorale).
nf-kB
Aujourd'hui, nous savons aussi que le facteur NF-kB joue
un rôle important dans la relation entre inflammation et
cancer. Cette protéine active l'expression de quelque 400
gènes dans les cellules inflammatoires, mais aussi dans
les cellules tumorales. Le facteur NF-kB intervient par
exemple dans l'immunité et l'inflammation qui sont né-
cessaires en réponse aux infections et lésions tissulaires.
Mais ce facteur joue également un rôle essentiel dans la
survie, la prolifération et la migration de nombreuses cel-
lules tumorales, et il est essentiel à l'angiogenèse. En 2004,
un modèle murin a permis de démontrer que l'inactivation
d'un gène impliqué dans l'activation du NF-kB et le pro-
cessus inflammatoire pouvait considérablement réduire
le développement tumoral chez les souris atteintes d'un
cancer gastro-intestinal (1). Le constat a entre-temps été
étendu aux tumeurs non intestinales.
Les connaissances se sont multipliées ces dernières an-
nées. Pourtant, de nombreuses questions restent sans
réponse. Comme celle de savoir si l'inflammation suffit
en soi pour induire une tumeur. Ou celle de comprendre
pourquoi tous les phénomènes inflammatoires chroniques
n'aggravent pas le risque de cancer.
inhiBition du tnf: lE paradoXE thérapEutiquE
Une autre question intéressante est de savoir comment
nous pouvons influencer l'équilibre entre une `mauvaise'
inflammation et une `bonne' inflammation. L'inflamma-
tion peut inhiber ou induire une tumeur. A quoi pouvons-
nous donc nous attendre si nous diminuons l'inflamma-
tion? Cette réduction s'accompagne-t-elle d'une baisse ou
d'une hausse du risque de cancer? Et peut-on utiliser un
traitement anti-inflammatoire pour traiter un cancer?
Le TNF joue sans aucun doute un rôle central en la matière.
Cette cytokine pro-inflammatoire est un important média-
teur d'affections inflammatoires. D'où l'idée d'utiliser les
inhibiteurs du TNF dans le traitement des phénomènes
inflammatoires chroniques. Si l'on part du principe que le
TNF favorise, de par son effet pro-inflammatoire, le déve-
loppement de cancers induits par l'inflammation, et donc
aussi la survie de ces cellules tumorales, on peut admettre
que les inhibiteurs du TNF peuvent prévenir ou traiter cer-
tains cancers. Tandis que d'autres tumeurs se développeront
vraisemblablement suite à la diminution de l'inflammation.
Le TNF joue par exemple un rôle important dans l'immu-
nité contre les infections, et l'inhibition du TNF peut aug-
menter la sensibilité aux infections. Il existe donc bel et bien
un certain paradoxe, y compris au niveau du traitement. La
question est de savoir de quel côté penche la balance. Les
études semblent indiquer que les nombres et les incidences
de la plupart des cancers sont comparables chez les patients
avec ou sans traitement anti-TNF, le nombre de lymphomes
étant peut-être légèrement plus élevé (2).
Mais l'avenir devra faire la clarté sur le sujet, car les effets du
traitement à long terme sont encore totalement inconnus.
psoriasis Et autrEs imid
Le psoriasis est l'un des exemples-types d'affections inflam-
matoires immunomédiées. Les études montrent que le pso-
riasis s'accompagne de facto d'un risque accru de cancer
cutané non mélanomateux et de cancer lymphoprolifératif
(3). Toutefois, le risque absolu de lymphome reste faible. Les
cancers associés au mode de vie (tabagisme, consommation
d'alcool) seraient, à leur tour, un peu moins fréquents chez
les patients psoriasiques. Par ailleurs, le risque de cancer
s'avère accru en cas de psoriasis sévère. La question reste de
savoir si cette augmentation de risque est due à l'inflamma-
tion accrue en soi ou au traitement systémique.
De même, l'arthrite rhumatoïde ­ un autre exemple-type
d'IMID ­ s'accompagne d'un risque légèrement accru de
lymphome (4). Pour l'arthrite rhumatoïde, on note en outre
un risque légèrement aggravé de cancer pulmonaire et un
risque accru de cancer cutané non mélanomateux, ainsi
qu'un risque légèrement plus élevé de mélanome. Le sché-
ma est plus ou moins comparable pour la maladie de Crohn.
tumEurs cutanéEs sous traitEmEnt
immunomodulatEur
Le modèle du cancer cutané chez des patients transplantés
a été mis en avant pour se faire une idée de l'incidence du
cancer de la peau chez les patients sous traitement immu-
nomodulateur. Les tumeurs cutanées sont les cancers les
plus fréquents chez les patients transplantés, avec une pré-
pondérance de carcinomes cutanés spinocellulaires. Les re-
commandations visant à protéger les patients transplantés