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GUNAIKEIA
VOL 17 N°7
2012
Ainsi, Ingle et al. ont démontré que quatre SNP (
single
nucleotide polymorphisms) sur le chromosome 14 étaient
associés au développement de l'AIMSS (21). Une autre
étude transversale réalisée auprès de 390 patientes mé-
nopausées atteintes d'un cancer du sein a établi que les
femmes qui avaient au moins un allèle 8-repeat dans le
gène CYP19A1 avaient un risque moindre d'AIMSS (22).
Chez les femmes coréennes ménopausées souffrant d'un
cancer du sein métastatique, un lien a été trouvé entre
l'haplotype M_3_5 et l'arthralgie (23).
Une autre suggestion qui expliquerait l'étiologie de
l'AiMSS concerne l'intervention des androgènes circu-
lants. Dans une étude de Gallichio, ainsi que dans l'étude
HOBOE, il a été démontré que les concentrations d'andro-
gènes augmentent au cours des 6 premiers mois de la
prise d'un inhibiteur de l'aromatase. Cependant, d'autres
études n'ont pas pu démontrer de différence au niveau
des concentrations d'androgènes pendant un traitement
anti-hormonal (24).
Par ailleurs, Gallicchio et al. ont également montré une
corrélation entre les modifications des taux de DHEAS
(sulfate de déhydroépiandrostérone) après 3 et 6 mois de
traitement par inhibiteur d'aromatase et les plaintes arti-
culaires. Ainsi, les femmes souffrant de douleurs articu-
laires présentaient une diminution significativement plus
importante des concentrations de DHEAS que les patientes
souffrant d'un cancer du sein sans plaintes articulaires.
Dans la même lignée, l'administration simultanée de tes-
tostérone et d'un inhibiteur de l'aromatase a également
été étudiée (25). De plus, il existe un lien entre les taux de
DHEAS et l'axe GH/IGF-I, ainsi qu'une corrélation négative
avec l'iMC.
Traitement
Si les mécanismes sous-jacents de l'AIMSS nécessitent
encore davantage d'éclaircissements, les études interven-
tionnelles relatives aux modalités thérapeutiques se font
clairement attendre. En outre, la douleur musculo-sque-
lettique est difficile à quantifier par manque de paramètres
objectifs et des méthodes standardisées sont nécessaires.
A ce jour, ces plaintes font principalement l'objet d'une
prise en charge symptomatique. Le groupe de travail
arthralgie a tenté d'élaborer un traitement reposant sur
un plan par étapes (
Figure 3) (20).
Il est essentiel d'informer suffisamment les patientes
avant le traitement de la survenue d'effets indésirables
éventuels afin de les y préparer au mieux et de maximiser
la compliance. Il est également important de constater les
plaintes articulaires déjà présentes, étant donné que ces
symptômes connaissent déjà une incidence élevée chez
les femmes durant la péri-ménopause et la post-méno-
pause. Des visites régulières de suivi sont nécessaires pour
assurer un bon suivi des effets indésirables. En cas de
plaintes modérées, des modifications du style de vie telles
que perte de poids, activité physique, arrêt tabagique et
limitation de la consommation de caféine et d'alcool sont
conseillées. Les plaintes sévères peuvent, quant à elles,
être soulagées par une intervention pharmacologique. Les
anti-inflammatoires non stéroïdiens, l'acétaminophène et
les inhibiteurs de la cyclo-oxygénase-2 sont les médica-
ments les plus fréquemment prescrits. Toutefois, leur utili-
sation chronique peut contribuer à des effets délétères sur
l'estomac, le coeur et les reins. En cas de SCC ou de suspi-
cion d'arthrite, il est recommandé de référer la patiente à
un spécialiste tel qu'un rhumatologue afin d'établir le bon
diagnostic et le traitement adéquat.
Pour les patientes qui présentent des plaintes sévères et
persistantes, une interruption de 3 mois du traitement par
l'inhibiteur de l'aromatase ou un passage au tamoxifène
peut offrir une solution. Après l'arrêt d'un traitement par
inhibiteur de l'aromatase, la plupart des patientes ressen-
tent une amélioration spontanée des symptômes. Le pas-
sage à un autre inhibiteur de l'aromatase peut également
améliorer l'arthralgie, bien que tous les inhibiteurs de
l'aromatase actuels sont associés à des symptômes mus-
culo-squelettiques. Dans une étude de Briot et al., le pas-
sage d'un inhibiteur de l'aromatase à un autre a induit un
effet favorable au niveau de l'AIMSS chez plus de la moitié
des patientes, et ce indépendamment de la séquence (1).
L'étude ATAC a montré que la moitié des patientes étaient
asymptomatiques 6 mois après le début du traitement, et
75% après 18 mois (6), mais cet effet temporaire n'a pu
être confirmé par plusieurs autres études.
D'autres traitements expérimentaux comportent notam-
ment de la glucosamine, des diurétiques, de la duloxétine,
des probiotiques et de la capsaïcine. Ainsi, un traitement à
base de glucosamine résulte en une diminution de la dou-
leur de 15% chez les patientes qui présentent des douleurs
articulaires induites par un inhibiteur de l'aromatase (14).
Un diurétique peut réduire l'accumulation périphérique de
liquide et ainsi diminuer le développement d'une arthral-
gie, comme une première étude pilote de petite envergure
l'a démontré (26).
Les probiotiques pourraient peut-être aussi avoir un ef-
fet favorable dans le traitement de l'AIMSS, étant donné
qu'ils soulagent les douleurs articulaires chez des patients
atteints de maladies intestinales inflammatoires (27). Leur
application chez les utilisatrices d'inhibiteurs de l'aroma-
tase n'a toutefois pas encore été étudiée.
Henry et ses collègues ont étudié l'effet de la sérotonine
et de la duloxétine (un inhibiteur de la recapture de la
norépinephrine utilisé notamment contre les douleurs
articulaires et musculaires chroniques et les douleurs
neuropathiques périphériques diabétiques), sur l'AIMSS
chez 29 patientes atteintes d'un cancer du sein. 72,4% des
patientes ont rapporté une diminution d'au moins 30%