background image
12
l
Neurone
·
Vol 18
·
N°8
·
2013
guérison définitive est plutôt rare: on peut
parler de stabilisation favorable sous traite-
ment, mais il faut toujours se méfier de la
rechute et de la désinsertion. La réhabilita-
tion psychiatrique permet alors de faire un
saut conceptuel en privilégiant le concept
de rétablissement, avec comme objectif
une vie heureuse. Le traitement par le tra-
vail n'est plus un but mais un moyen visant
à éviter la rechute en stabilisant la réinser-
tion socio-familiale. Il s'adresse à des pu-
blics fragilisés, désavantagés dans les pro-
cédures traditionnelles d'embauche, pour
lesquels il est souhaitable d'apporter une
démarche individualisée, active et volon-
tariste, centrée à la fois sur la personne et
l'employeur.
La mission de réhabilitation psychia-
trique est bien définie par Anthony et al.
à l'Université de Boston, en 2002 (1): «Il
s'agit d'aider la personne avec une inca-
pacité psychiatrique sévère à développer
des aptitudes et d'aménager les soutiens
nécessaires pour lui permettre de vivre,
d'apprendre, de travailler et de se socia-
liser avec succès et satisfaction dans les
environnements de son choix avec le
moins possible d'aide professionnelle
continue.
»
Problématique
En psychiatrie, différentes conceptions et
pratiques de la réadaptation profession-
nelle ont été développées. Dans la litté-
rature scientifique internationale, une
pratique se dégage des autres en se re-
vendiquant de la méthode scientifique: il
s'agit du modèle IPS (Individual Place-
ment and Support
) de soutien à l'emploi
qui a, depuis 10 ans, le statut d'Evi-
dence-Based-Practice
, c'est-à-dire d'une
pratique basée sur les preuves.
Le modèle IPS est un modèle clinique
d'intégration au travail pour aider les
personnes avec une incapacité psychia-
trique sévère à choisir, obtenir et garder
un emploi rémunéré sur le marché régu-
lier de l'emploi.
En Belgique, le modèle IPS se cherche en
Flandre, tout comme à Bruxelles et en
Wallonie. D'autres conceptions et ap-
proches de la réadaptation profession-
nelle occupent le terrain et conservent
leur légitimité. La Belgique prépare une
nouvelle réforme de la psychiatrie. Com-
ment le modèle IPS trouve-t-il sa place
dans la philosophie, les principes et le
cadre administratif définis par la réforme
des soins de santé mentale (article 107
de la loi sur les hôpitaux)?
L'approche sociologique
70 à 90% des malades mentaux sévères
(MMS) ne travaillent pas, mais 50 à 70%
d'entre eux le souhaitent! Une mauvaise
santé mentale (troubles légers) entraîne
des jours d'incapacité de travail, les
troubles modérés engendrent les pre-
mières mises en invalidité temporaire,
mais les MMS sont généralement une
cause stable d'invalidité. Pour améliorer
ce dernier point, on a créé le soutien à
l'emploi pour les MMS: dans le modèle
IPS, le spécialiste en emploi (SE) fait
partie d'une petite équipe avec un coor-
dinateur. Chaque SE gère le suivi de
maximum 20 bénéficiaires à la fois en
dispensant l'ensemble des aides sui-
vantes: orienter, placer, évaluer, déve-
lopper, maintenir. Les SE ne délivrent
que des services en rapport avec l'em-
ploi et s'intègrent à l'équipe clinique du
bénéficiaire partageant les décisions.
S. Gueli (assistant social et SE) rapporte
la difficile implantation du modèle IPS à
Photo 1: Bruno Monaco, Guy Deleu et Philippe Fontaine.
Le modèle IPS de soutien
à l'emploi est un modèle
clinique d'intégration
au travail pour aider
les personnes avec une
incapacité psychiatrique
sévère à choisir, obtenir
et garder un emploi rémunéré
sur le marché régulier
de l'emploi.
70 à 90% des malades
mentaux sévères ne
travaillent pas, mais 50 à
70% d'entre eux le
souhaitent!