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Vol 7
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N° 2
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2013
Reçu: 14/03/2013 ­ Accepté: 05/04/2013
Du tabagisme et de l'intérêt d'arrêter de fumer pour les femmes britanniques
Parmi les femmes britanniques qui fument, deux
tiers des décès sont dus au tabagisme chez les quin-
quagénaires, sexagénaires et septuagénaires. Arrê-
ter de fumer avant 40 ans ou, mieux encore, avant
30 ans permettrait d'éviter une grande partie de ces
décès, selon une étude parue dans The Lancet.
Le tabagisme, et principalement la cigarette, reste la principale
cause de mortalité évitable dans des pays tels que la Grande-
Bretagne et les Etats-Unis, et ce malgré la baisse de la prévalence
du tabagisme et un meilleur contrôle de la composition des ciga-
rettes. Pour les fumeurs aujourd'hui âgés de 60 ans, leur compor-
tement tabagique actuel, mais aussi l'ensemble de leurs antécé-
dents tabagiques ont des répercussions. Les hommes nés au cours
du premier quart du siècle précédent ont souvent commencé à
fumer à un âge relativement jeune. Pour les femmes, la situation
est quelque peu différente, dans la mesure où ce n'est qu'à partir
des années 1960 que la cigarette a gagné en popularité dans la
population féminine. Autrement dit, il a fallu attendre le 21
e
siècle
avant de pouvoir étudier correctement les effets du tabagisme et
de l'arrêt tabagique à long terme sur la mortalité féminine.
Kirsten Pirie (Oxford) et ses collaborateurs se sont penchés sur ce
sujet dans le cadre d'une étude prospective incluant 1,3 million de
femmes britanniques recrutées entre 1996 et 2001. Après exclu-
sion de 100.000 d'entre elles pour raison de maladie, 1,2 million de
femmes ont finalement été incluses (année de naissance médiane:
1943, âge médian: 55 ans). Les sujets ont été interrogés sur leur
comportement tabagique au début de l'étude, après 3 ans et après
8 ans. A l'entame de l'étude, 20% des sujets fumaient, 28% étaient
des ex-fumeurs et 52% n'avaient jamais fumé.
Les femmes ont été suivies jusqu'au 1
er
janvier 2011, avec comme
principal critère d'évaluation le taux de mortalité. Au cours du
suivi, 6% des participantes (66.489/1.180.652) sont décédées, à un
âge moyen de 65 ans.
La mortalité à 12 ans était 2,76 fois moins élevée dans le groupe
des femmes n'ayant jamais fumé que dans celui des femmes qui
fumaient au début de l'étude, même si 44% de ces dernières ont
indiqué avoir arrêté de fumer lors de l'enquête réalisée après
8 ans. Dans le groupe qui fumait encore lors de l'enquête réalisée
après 3 ans, la mortalité à 12 ans était trois fois plus élevée que
chez les femmes qui n'avaient jamais fumé.
La mortalité supplémentaire dans le groupe des fumeuses par rap-
port aux sujets n'ayant jamais fumé était essentiellement imputable à
des affections causées par le tabagisme, comme le cancer du poumon.
Dans les groupes des ex-fumeuses qui avaient arrêté entre
25 et 34 ans et entre 35 et 44 ans, les risques relatifs par rapport
aux sujets n'ayant jamais fumé s'élevaient respectivement à 1,05 et
1,20 pour la mortalité globale et à 1,84 et 3,34 pour la mortalité
par cancer du poumon. Bien que les ex-fumeurs courent toujours
un risque de mortalité supérieur, celui-ci ne s'élève qu'à 3% (arrêt
entre 23 et 34 ans) et 10% (arrêt entre 35 et 44 ans) du risque
supplémentaire encouru par les personnes qui continuent à fumer.
Aussi, les auteurs concluent qu'arrêter de fumer avant 40 ans ou,
mieux encore, avant 30 ans permet de réduire respectivement de
plus de 90% et de plus de 97% le risque de mortalité supplémen-
taire encouru en cas de poursuite du tabagisme.
Pirie K, Peto R, Reeves G, et al. The 21st century hazards of smoking and bene-
fits of stopping: a prospective study of one million women in the UK. Lancet
2013;381:133-41.
Radiothérapie post-opératoire dans le cancer de la prostate
La radiothérapie post-opératoire a un bien meilleur
effet sur la survie sans progression biologique et le
contrôle local que l'approche attentiste, même après
plus de 10 ans. L'effet bénéfique sur la survie sans
progression clinique semble surtout se manifester
chez les personnes de moins de 70 ans et en cas de
marges d'exérèse positives. C'est ce que suggère une
étude internationale publiée dans The Lancet.
Lorsque la tumeur est limitée à la prostate, la prostatectomie radi-
cale donne de bons résultats en termes de contrôle local à long
terme et de survie. Lorsqu'elle s'étend au-delà de la prostate ou
en cas d'envahissement des vésicules séminales, le risque d'échec
du traitement local est de 10 à 50%.
Trois études de phase III randomisées ont déjà démontré que l'ad-
ministration d'une radiothérapie immédiatement après l'opération
donnait de bien meilleurs résultats que la radiothérapie différée
en termes de contrôle local et de survie sans progression biochi-
mique. Après un suivi médian de 5 ans, l'essai 22911 de l'EORTC
(European Organisation for Research and Treatment of Cancer) a été
le premier à montrer que la radiothérapie post-opératoire per-
mettait de prolonger la survie sans progression, tant biochimique
que clinique. Dans cet essai, 1.005 sujets (de maximum 75 ans)
avec un cancer de la prostate cT0-3 non traité ont été randomi-
sés après l'intervention entre une radiothérapie post-opératoire
immédiate et une approche attentiste (jusqu'à la survenue d'une
progression biochimique).
Récemment, The Lancet a publié les résultats à plus long terme
de cet essai de l'EORTC (après un suivi médian de 10,6 ans). Les
chercheurs voulaient savoir si les effets bénéfiques sur la survie
sans progression rapportés précédemment (après un suivi de
5 ans) persistaient et quels étaient les effets sur la survie globale.
Après un peu plus de 10 ans de suivi, la radiothérapie post-
opératoire immédiate avait toujours un effet bénéfique
significatif sur la survie sans progression biochimique par rapport
à l'approche attentiste (39,4% des sujets du groupe radiothérapie
présentaient une progression ou étaient décédés, contre 61,8%
dans le groupe de contrôle; p < 0,0001).
Les auteurs concluent que les résultats après 10,6 ans de suivi
montrent que la survie sans progression biochimique et le
contrôle local sont significativement meilleurs après une radiothé-
rapie post-opératoire, ce qui confirme les résultats constatés après
5 ans. En revanche, l'avantage au niveau de la survie sans progres-
sion clinique avait disparu.
Des analyses exploratoires laissent penser que la radiothérapie
post-opératoire permet de prolonger la survie sans progression
clinique chez les patients de moins de 70 ans et en cas de marges
d'exérèse positives, mais qu'elle peut avoir un effet préjudiciable
chez les plus de 75 ans.
Bolla M, Van Poppel H, Tombal B, et al. Postoperative radiotherapy after radical pros-
tatectomy for high-risk prostate cancer: long-term results of a randomised control-
led trial (EORTC trial 22911). Lancet 2012;380:2018-27.