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l
Neurone
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Vol 17
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N°9
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2012
chef d'orchestre de ce réseau circadien
complexe est l'horloge centrale présente
dans les noyaux suprachiasmatiques de
l'hypothamus (NSC) (Figure 1).
Les NSC génèrent des rythmes circadiens
(environ 24h) qui persistent en situation
d'isolement, démontrant ainsi leur na-
ture endogène. Les NSC ont aussi la ca-
pacité d'être entraînés à 24h précises
(remis à l'heure) par divers synchroni-
seurs (Zeitgebers). Le synchroniseur le
plus puissant est le cycle jour/nuit, mais
d'autres facteurs, comme la restriction
alimentaire, l'activité physique ou des
drogues chronobiotiques sont connus
pour être dans certaines conditions aussi
efficaces (1, 2).
«Gènes-horloges» et
oscillateurs
Au cours de la dernière décennie, les
mécanismes moléculaires permettant
d'expliquer la genèse du rythme dans les
NSC ont été identifiés et une dizaine de
gènes appelés «gènes-horloges» ont été
identifiés (3). La présence et l'expression
rythmique de ces gènes, toutefois, n'est
pas exclusive aux NSC. Elle a aussi été
décrite dans de nombreuses régions du
cerveau (p.ex. cervelet, hippocampe,
noyaux arqués, noyaux paraventricu-
laires de l'hypothalamus, cortex piri-
forme et cérébral, bulbes olfactifs, amyg-
dale, rétine, glande pinéale, etc.), ainsi
que dans des tissus non neuronaux à la
périphérie (foie, pancréas, adipocytes,
intestin, poumon, coeur, etc.) (4, 5). Il
apparaît donc que de nombreux tissus et
organes contiennent des oscillateurs cir-
cadiens (aussi appelés horloges périphé-
riques dans la littérature) et ce sont des
mécanismes moléculaires semblables à
ceux présents dans les NSC qui sont res-
ponsables de la genèse de ces rythmes.
Tous ces oscillateurs centraux ou péri-
phériques sont des éléments importants
du système circadien multi-oscillant dé-
fini plus haut. Le rôle exact de ces os-
cillations moléculaires n'est pas encore
totalement déterminé. Très probable-
ment, le rôle de ces oscillateurs est de
permettre à l'organe de maintenir une
rythmicité robuste ou de permettre à
l'organe d'anticiper les signaux circa-
diens en provenance des NSC (6) sans
exclure la possible distribution d'un si-
gnal circadien par voies nerveuse, humo-
rale ou hormonale. Après lésion des
NSC, l'expression circadienne des
gènes-horloges persiste dans certains tis-
sus centraux et périphériques. Toutefois
les phases d'expression de ces rythmes
entre les différents organes d'un même
individu ne sont plus coordonnées (7).
Chez l'individu intact, les NSC sont donc
le chef d'orchestre qui contrôle la parti-
tion «temporelle» en synchronisant tous
les oscillateurs centraux et périphé-
riques. Les NSC sont la voie d'entrée
unique de la lumière pour la synchroni-
sation à 24h des rythmes physiologiques.
Par contre, les NSC, comme les oscilla-
teurs périphériques, sont aussi la porte
d'entrée pour l'action des autres syn-
chroniseurs potentiels. Plus précisément,
dans des conditions expérimentales pré-
cises, quelques signaux/synchroniseurs
en provenance d'oscillateurs centraux
ou périphériques (mélatonine, glucocor-
ticoïdes) ou des signaux externes (nutri-
tion, activité forcée) peuvent imposer
une organisation fonctionnelle circa-
dienne. Ce système circadien multi-
oscillant, même s'il est organisé hiérarchi-
quement ­ avec un contrôle fort des NSC
­ est très probablement flexible au ni-
veau fonctionnel. En fonction des condi-
tions environnementales (par exemple,
travail de nuit ou travail posté), le sys-
tème multi-oscillant sous l'effet des ré-
trocontrôles multiples se réorganise
fonctionnellement. Ce sont toutes ces
interactions multiples qui, in fine, per-
mettent une bonne coordination interne
(temporelle) des fonctions physiolo-
Nota: Beaucoup d'oscillateurs secondaires (aussi appelés horloges secondaires ou périphériques dans la littérature) ont
été identi és dans le cerveau et dans de nombreux tissus périphériques. L'organisation temporelle des fonctions est dépendante de l'horloge principale,
qui synchronise le fonctionnement des di érents oscillateurs. Les èches noires représentent les voies nerveuses utilisées par les NSC pour
distribuer les messages circadiens aux structures périphériques. La mélatonine (violet) est synthétisée dans la glande pinéale et secrétée
uniquement la nuit et ce sous le contrôle des NSC. Comme e érence hormonale majeure des NSC, le rythme nocturne de mélatonine distribue dans tout
l'organisme, via la circulation générale, un message circadien utilisable par les structures contenant des récepteurs pour la mélatonine.
Redessiné et modi é à partir d'une gure de l'article de Pevet, et al. 2011 (6).
Glande pinéale
mélatonine circulante
Horloge centrale (NSC)
Distribution du signal circadien par voies nerveuses
Distribution du signal circadien par la mélatonine
Figure 1: L'horloge circadienne principale est localisée dans les noyaux suprachiasmatiques
de l'hypothalamus (NSC).