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Percentile
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Vol 18
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N°6
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2013
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Bien que les causes des toxicités tardives soient multifactorielles (type
tumoral, prédisposition génétique, comorbidités, comportements liés à
la santé, âge au diagnostic, sexe, etc.), le type de traitement (chirurgie,
radiothérapie, chimiothérapie) possède l'impact le plus important sur
le devenir à long terme des survivants d'un cancer pédiatrique. ainsi,
par exemple, au-delà d'une certaine dose cumulée, les anthracyclines
peuvent engendrer une toxicité cardiaque tandis que les agents alkylants
peuvent être responsables d'un hypogonadisme ou d'une infertilité.
Le tableau 2 donne un aperçu des différents types de toxicités tardives
liées aux traitements ainsi que les recommandations de suivi pour chaque
organe ou système. Ces recommandations, ici schématisées, sont bien
entendu à adapter à l'histoire du patient, en prenant en compte la pré-
sence d'autres facteurs de risque, l'existence de comorbidités ainsi que
l'histoire familiale.
L'évolution socio-économique et la qualité de vie
À côté des séquelles physiques, les adultes ayant présenté un cancer
dans l'enfance peuvent être confrontés à des troubles cognitifs, incluant
des troubles de l'attention, de la mémoire, des fonctions exécutives et
de la vitesse d'exécution. Ces troubles de l'apprentissage (9) sont liés à
la tumeur elle-même ou à ses traitements (radiothérapie crânienne et/
ou chimiothérapie intrathécale) et peuvent être à l'origine de difficultés
scolaires (10) et professionnelles. sur le plan psychologique, on peut
retrouver un certain degré de détresse et d'anxiété par rapport à la santé
future, à une éventuelle rechute, à l'apparition d'un second cancer, à des
problèmes de fertilité, ainsi qu'à des limitations physiques liées à de pos-
sibles toxicités tardives. Des difficultés dans la création des liens d'ami-
tié ont aussi été rapportées (11). par rapport à la population contrôle, le
taux de cohabitation (12) et de mariage (13) est inférieur, en particulier
pour les adultes ayant présenté une tumeur cérébrale dans l'enfance et
ayant été traités par radiothérapie crânienne (12). par ailleurs, plus de
10% des survivants d'un cancer pédiatrique présentent un état de stress
post-traumatique, persistant souvent plusieurs années après le diagnos-
tic (14). néanmoins, malgré ces difficultés, la qualité de vie liée à la santé
est souvent décrite comme normale, voire même meilleure que celle des
normes standardisées et la plupart des survivants décrivent un bon degré
de satisfaction dans leur vie actuelle.
Discussion: la mise en pratique
du suivi à long terme
au cours des dernières années, une connaissance fine des toxicités tar-
dives a pu être acquise grâce aux vastes études menées sur des cohortes
d'adultes ayant présenté un cancer pédiatrique. néanmoins, la mise en
oeuvre du suivi à long terme de cette population comporte encore cer-
taines inconnues. quels intervenants sont les mieux habilités à suivre
ces patients? quels sont les souhaits des patients et de leurs médecins
traitants? quels examens doit-on proposer et à quelle fréquence? À quel
moment par rapport à la fin du traitement doit-on proposer le passage
vers une consultation de suivi à long terme?
Un point essentiel pour le bon fonctionnement du suivi à long terme
après cancer pédiatrique est l'existence d'une collaboration étroite entre
le médecin généraliste, l'oncologue pédiatre, les médecins spécialistes
(oncologues adultes, internistes, radiologues, médecins nucléaristes, etc.)
et le patient (ainsi que ses parents dans certains cas). Individuellement,
chaque intervenant ne possède en effet qu'une partie des connaissances
nécessaires à ce type de suivi et seule une vision multidisciplinaire
peut aboutir à un suivi de qualité. ainsi, le médecin traitant joue un rôle
essentiel en intégrant les recommandations de suivi au vécu de chaque
Tableau 1: Facteurs de risque liés à l'hôte et aux traitements pour les principaux types de seconds cancers (15).
Second cancer
Facteurs de risque liés à l'hôte
Facteurs de risque liés aux traitements
tous
sexe féminin, jeune âge au diagnostic,
cancer pédiatrique de type lymphome de
hodgkin ou sarcome des tissus mous
agents alkylants, épipodophyllotoxines,
anthracyclines
sein
sexe féminin, cancer pédiatrique de type
tumeur osseuse ou sarcome des tissus mous
Irradiation thoracique
thyroïde
Jeune âge au diagnostic
Irradiation thyroïdienne (20 à 40Gy)
système nerveux central
Jeune âge au diagnostic (gliomes),
âge 5 ans lors du premier traitement
(méningiomes)
Irradiation du système nerveux central
sarcomes
Cancer pédiatrique de type sarcome des
tissus mous, antécédents d'autres types
de seconds cancers, histoire familiale de
cancers
Irradiation du système nerveux central
Cancer de la peau de type non-mélanome
Race blanche, cancer pédiatrique de type
lymphome de hodgkin, histoire familiale de
cancer de la peau
Radiothérapie