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Skin
Vol 16
N°6
2013
27
discrètes, groupées dans une zone de
peau normale, sans fond hyper- ou hypo-
pigmenté. L'absence de fond pigmenté
constitue la principale différence par rap-
port au naevus spilus maculosus (12, 13).
Les lésions présentent une forme de dra-
peau ou en damier. Pour les lésions simi-
laires qui suivent les lignes de Blaschko,
Happle et al. (14) proposent d'utiliser le
terme «naevus lentigineux linéaire». Un
naevus épidermique verruqueux est un
hamartome dérivé de cellules germina-
tives pluripotentes, principalement com-
posées de kératinocytes, localisés dans la
couche basale de l'épiderme embryon-
naire (15). Comme en cas de vitiligo seg-
mentaire, le mosaïcisme génétique est
ici considéré comme un potentiel méca-
nisme sous-jacent (6, 16).
Plus récemment, des preuves d'une théo-
rie auto-inflammatoire pour le vitiligo
segmentaire ont été publiées (17). Nous
ne savons toutefois pas encore si le dérè-
glement du système constitue l'événe-
ment primaire (théorie du skin homing)
ou s'il est la conséquence d'anomalies au
niveau des cellules de l'épiderme (théo-
rie du mosaïcisme cutané) (2, 18). Un
exemple analogue possible de ce phéno-
mène a été baptisé «blaschkite» ou lichen
strié chez l'enfant; il s'agit d'une dermatite
inflammatoire associée à un mosaïcisme
génétique (19, 20). Les deux présentent
un schéma de réaction blaschkoïde.
Pour le vitiligo, on présume que le méla-
nocyte est le premier type de cellule à être
affecté. Dans notre étude, les affections
cutanées qui touchent les mélanocytes
sont associées de manière significative à
une ressemblance de grades 3-4 par rap-
port au schéma du vitiligo segmentaire
(Figures 5 et 6). En outre, une analogie
totale (grade 4) n'a été constatée que
pour les pathologies en mosaïque, où sont
impliqués les mélanocytes.
Nous avons retrouvé un schéma récur-
rent dans une partie significative de
nos lésions vitiligineuses segmentaires
(Figures 3 et 4). Sur la partie supérieure
du tronc et sur le front, elles se présen-
taient souvent sous la forme d'un V. Fait
étonnant: cette forme en V incliné sur le
front correspond à la diffusion embryon-
naire des crêtes neurales. Ce schéma
cutané singulier a également été rapporté
par Hann dans un cas de naevus spilus
sur le front (21). Bien que nos résultats
se basent sur un nombre significatif de
patients, il convient d'évaluer la généra-
lisation de nos observations dans le cadre
d'autres études. Jusqu'à présent, Happle
(8, 9) a décrit cinq schémas différents qui
reflètent le mosaïcisme. Il s'agit des lignes
de Blaschko (bandes étroites de type 1a
et bandes larges de type 1b), du schéma
en damier (type 2), du schéma phylloïde
(type 3), de taches étendues sans délimi-
tation à la ligne médiane (type 4) et du
schéma de latéralisation (type 5).
Le vitiligo segmentaire ne montre au-
cune ressemblance claire avec le type 1a
(bandes de Blaschko étroites), comme
indiqué dans nos scores de ressemblance
négatifs pour les pathologies cutanées
qui présentent une diffusion typique en
lignes de Blaschko étroites (hypoméla-
nose d'Ito, incontinence pigmentaire,
hypermélanose linéaire et spiralée) ou
de mosaïcisme de types 3-5. Toutefois,
les similitudes avec le schéma de type
1b n'ont été observées qu'au niveau du
visage pour un certain nombre de lésions
localisées dans les régions péri-auricu-
laire, mandibulaire et temporale (Figure 6).
Par ailleurs, la diffusion des lésions en V
sur la partie supérieure du tronc évoquait
une combinaison des schémas de types
1b et 2 (Figure 4). Étant donné que la
majorité de nos lésions vitiligineuses
segmentaires ne montraient cependant
aucune ressemblance frappante avec les
5 schémas de mosaïcisme actuellement
définis, nous pouvons supposer que le
schéma du vitiligo segmentaire reflète
probablement un schéma distinct et
nouveau (type 6) de mosaïcisme cutané.
Selon la théorie de Happle, un type de
vitiligo mixte (combinaison de vitiligo seg-
mentaire et non segmentaire) pourrait re-
fléter une forme composite de mosaïcisme
segmentaire, dû à une perte postzygo-
tique d'hétérozygotie impliquant l'un des
gènes qui prédisposent à cette pathologie,
tandis que les lésions segmentaires soli-
taires peuvent être classées comme une
forme de mosaïcisme «isolé». Toutefois,
le concept de vitiligo segmentaire mixte
relève encore de la théorie et nous man-
quons toujours de données probantes au
Figure 3: a) Schéma typique de vitiligo
segmentaire sur le front, au niveau de la
face médiane du sourcil (V incliné) dans
notre population de patients; b) super-
position de toutes les lésions unilatérales
en haut à droite; c) superposition de toutes
les lésions unilatérales en haut à gauche;
d) combinaison de toutes les lésions.
Figure 4: Schéma typique de vitiligo segmentaire sur la partie supérieure du tronc (en V)
dans notre population de patients.