Cassiman avait donné un coup de pied bien nécessaire dans la fourmilière période de difficultés économiques, il n'est pas acceptable de prescrire des traitements anticancéreux qui coûtent cher et qui ne per- mettront peut-être de gagner que deux mois de vie». D'après lui, il n'est plus possible de consacrer 100.000 à 200.000 euros par an et par patient. Cette prise de position a lancé un débat éthique, et donc difficile presque par définition. Les déclarations du profes- seur émérite de la KU Leuven ont en partie été à l'origine d'un symposium organisé par les centres d'oncologie du ZNA (Ziekenhuis Netwerk Antwerpen) et de l'UZA (Universi- tair Ziekenhuis Antwerpen) sur le thème «Les soins oncologiques sont-ils encore abordables en 2012?». «Nous devons penser à l'avenir des soins onco- logiques», a expliqué Jean-Jacques Cassiman à l'appui de ses déclarations précédentes. «Des technologies et des traitements nou- veaux, mais aussi de plus en plus chers font sans cesse leur apparition. La question que nous devons nous poser, c'est celle de savoir s'il va falloir soumettre l'utilisation de ces traitements à certains critères.» L'un de ces critères étant l'âge du patient. chiel Callens. «Le dépistage du cancer du sein est limité aux femmes entre 50 et 69 ans. Les femmes plus âgées (ou plus jeunes) peuvent aussi être confrontées à la maladie mais elles ne bénéficient d'aucun remboursement pour le dépistage.» Pour Jacques De Grève, l'appli- cation d'un critère d'âge est un véritable scandale. «L'âge ne peut pas être un critère de sélection. Dans quelle société vivons-nous, si nous ne pouvons plus offrir une prise en charge optimale aux patients à partir d'un certain âge? L'exemple du dépistage du cancer du sein cité par Michiel Callens est tout bonne- ment scandaleux.» Une prise de position que ne partage pas Michiel Callens: «L'âge et la qualité de vie sont pourtant des éléments essentiels. Par exemple, lorsqu'une personne démente est atteinte d'un cancer, il n'y a pas lieu de poursuivre le traite- ment. Il ne faut évidemment pas aller aussi loin qu'aux Pays-Bas, qui ont fixé un "âge limite" abomination, Michiel Callens et Jacques De Grève sont entièrement d'accord sur ce point. Quant à savoir si un patient dément doit bénéficier de soins oncologiques, ils sont déjà moins clairement unanimes. «L'exemple cité par Michiel Callens n'a rien à voir avec l'âge, il s'agit plutôt d'une question de comorbidité», a répondu Jacques De Grève. sion», a souligné Jean-Jacques Cassiman. «Quand on parle ouvertement avec des per- sonnes d'un certain âge, souvent ce sont elles De nombreux traitements "inutiles" pourraient donc être évités.» si l'âge peut être un critère pour la prise en charge du patient n'appelle pas une réponse unique. «Chaque patient est différent. Mais à un certain âge et avec une certaine comorbi- dité, beaucoup de gens choisissent de ne pas continuer le traitement», a-t-elle affirmé, en accord avec Jean-Jacques Cassiman. «Il faut l'admettre, les personnes concernées posent souvent, pour ne pas dire presque toujours, une condition importante: le temps qu'il leur reste doit être "agréable". Différents facteurs peuvent influencer leur décision. Les patients qui sont très entourés par leur famille et leurs amis ne réagissent pas de la même manière que ceux qui sont totalement isolés. Il en va du rôle et de la tâche du médecin traitant d'apporter son soutien.» «Du reste, la question de l'âge est souvent prise par le mauvais bout», est intervenu Dirk van Bekkum. «Le médecin doit uniquement tenir compte de l'âge biologique du patient, et non de son âge chronologique. Une per- sonne de 90 ans peut parfois être en meilleure santé qu'une personne de 50 ans, ou même qu'une personne de 20 ans.» Chez lui, aux Pays-Bas, Dirk van Bekkum mène une lutte acharnée contre l'utilisation de l'âge comme critère exclusif de prise en charge. «L'exclu- sion de certains patients sur la base de leur âge est contraire à la constitution néerlandaise et à l'article 13 de la Convention européenne des y avoir aucune discrimination liée à l'âge. J'ai intenté un procès à l'Etat néerlandais, car la décision du gouvernement d'instaurer malgré tout une limite d'âge viole ces deux textes législatifs.» largement sur le fait que l'âge (seul) ne pou- vait pas constituer un critère suffisant. Mais quelle serait la solution? Pour Jacques De Grève, la réponse est claire. «Deux critères doivent être pris en compte par le médecin: l'efficacité du traitement et la toxicité du trai- tement», a insisté le professeur bruxellois. Un avis appuyé par Dirk van Bekkum dans des termes légèrement différents: «Le méde- en concertation avec son équipe. Il est de son devoir de servir l'intérêt du patient, de son patient. Il n'a pas à se soucier du reste de la société.» Un point de vue totalement dé- passé, selon Michiel Callens. «Actuellement, 10% du PIB vont aux soins de santé. Des études néerlandaises montrent que si nous laissons les choses suivre leurs cours, ce chiffre grimpera jusqu'à 50% du PIB. Personne ne veut cela. Il faut donc impérativement faire des choix.» Pour Elke Van Hoof, il n'est plus réaliste que le médecin puisse prendre toutes les déci- sions, quel que soit le coût du traitement. «Un gros problème, dans toute cette discus- sion, c'est que les médecins ne sont pas formés à la gestion des coûts. La plupart d'entre eux n'ont pas la moindre idée du coût d'un traite- abordables en 2012? année et le prix des traitements ne cesse de grimper. La société peut- elle continuer à financer tous les traitements? En cette période de crise économique et financière, la question est d'une actualité criante. «Des technologies et des traitements nouveaux, mais aussi de plus en plus chers, font sans cesse leur apparition. La question que nous devons nous poser, c'est celle de savoir s'il va falloir soumettre l'utilisation de ces traitements à certains critères.» De Grève, la société va devoir décider de réaffecter certains budgets en faveur de la prise en charge oncologique. que cette discussion doit être beaucoup plus ouverte au sein de la société. |