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Dans le cas de notre patiente, la présence
d'arthrites fait que le diagnostic est for-
mel, a posteriori.
Que faire?
L'objectif est d'enrayer la cascade inflam-
matoire afin de prévenir les séquelles ar-
ticulaires sans donner un traitement trop
lourd, d'autant plus que près de 50% des
AJIs sont monophasiques et se résolvent
en quelques semaines. Ces formes mono-
phasiques ne peuvent cependant être
identifiées dans un premier temps.
Le traitement de première ligne repose
classiquement sur les AINS. Les bonnes
réponses ne sont pas rares si le traite-
ment est supporté. Un traitement d'essai
par AINS permet de voir si des symp-
tômes tels que la fièvre ou les raideurs
s'amendent ou non au bout de 7 jours. En
cas de réponse positive, le traitement est
maintenu maximum 3 mois. Dans le cas
contraire, il est nécessaire de passer aux
corticostéroïdes.
Notre approche est de débuter le traite-
ment par l'administration de doses supra-
physiologiques de prednisolone (0,1mg/
kg/j), éventuellement après 1 ou 2 jours
d'un bolus iv de méthylprednisolone
20mg/kg/j. Ce régime a l'avantage de
n'avoir que très peu d'effets secondaires
systémiques et d'identifier rapidement les
patients répondeurs aux petites doses de
cortisone. Chez les autres, les symptômes
se manifestent à nouveau dès que les ef-
fets du bolus s'estompent et les doses de
CS seront augmentées jusqu'à 1, voire
2mg/kg/j selon la réponse. Dans ce cas,
d'autres options thérapeutiques doivent
être envisagées, dans un but d'épargne
cortocoïde, avec l'objectif de revenir rapi-
dement aux doses supra-physiologiques.
Audelà de 3 mois de corticothérapie
systémique, on expose l'enfant à des
effets secondaires graves compromet-
tant la croissance et la santé ultérieure
(ostéonécrose de la hanche, ostéoporose
sévère, impotence, aggravation des épi-
sodes infectieux...).
Le suivi du patient se base sur le comptage
des articulations gonflées, le nombre
d'articulations douloureuses, une évalu-
ation de la qualité de vie, une évaluation
subjective par le patient, ainsi que sur la
biologie. L'agrégation de ces résultats
donne un score d'activité de la maladie,
reproductible.
Les alternatives à la cortisone
La deuxième ligne est occupée par le
thotrexate (MTX), immunomodulateur,
inducteur de rémission, à visée d'épargne
corticoïde. Il est utilisé per os en une ad-
ministration hebdomadaire d'une faible
dose (10-15mg/m²), qui induit environ
60% de réponses au terme d'un délai de
l'ordre de 6 à 8 semaines. Il est rarement
mal toléré sur le plan gastrique. De la
vitamine B9 (acide folique) lui est clas-
siquement associée, le lendemain de la
prise.
En 3
e
ligne, on envisage les traitements
biologiques: traitements ciblés contre
des cytokines inflammatoires. Les agents
bloquant le TNF-alpha sont les plus an-
ciens. Seuls 50% des AJIs y répondent sur
le plan systémique (fièvre). De plus, leur
remboursement exige une atteinte poly-
articulaire. Leur profil de sécurité est bon,
le recul est important.
Depuis quelques années, de nouveaux
traitements biologiques ont été déve-
loppés, entraînant une révolution pour
la prise en charge des AJIs sévères histo-
riquement très difficiles à soigner sans
une longue corticothérapie. Ils ciblent
les cytokines inflammatoires impliquées
dans la physiopathologie de l'AJIs: l'IL-1
(canakinumab, anticorps monoclonal hu-
main dirrigé contre l'interleukine 1-beta,
médicament seulement disponible actu-
ellement pour l'AJIs dans le cadre d'études
cliniques) et l'IL-6 (tocilizumab, RoActem-
ra
®
, commercialisé par les laboratoires
Roche et remboursé dans l'AJIs depuis le
1
er
avril 2012). Le tocilizumab est un an-
ticorps monoclonal humanisé qui bloque
l'action des récepteurs de l'interleukine 6,
et donc la cascade inflammatoire.
Comme Marine restait très symptoma-
tique, avec biologie très inflammatoire,
en dépit de fortes doses de cortisone, du
MTX et d'un essai infructueux avec un
anti-TNF-alpha, elle a bénéficié d'un trai-
tement par tocilizumab (anti-IL6), avant
son remboursement, dans le cadre d'un
Medical Need Programme.
Le traitement a débuté en août 2011 en
hospitalisation de jour. 18 articulations
étaient enflammées au départ. Sept jours
plus tard, on observait une disparition de
la fièvre, une amélioration de l'état gé-
néral et une prise de sang normalisée
(CRP nulle). Elle avait repris le chemin
de l'école, et le nombre d'articulations
touchées était tombé à 9. La rémission
clinique complète a été obtenue en
2 mois.
Le tocilizumab est administré en perfu-
sion toutes les 2 semaines et permet de
diminuer assez vite cortisone et AINS. Il
est indiqué dans les formes réfractaires,
sévères de maladie de Still. Il peut être
prescrit sans passer par le MTX. Le taux
de réussite de ce traitement est très élevé
et le profil de sécurité est bon. Il doit être
réservé à l'usage des médecins expéri-
mentés dans le diagnostic et le traitement
des arhrites juvéniles idiopathiques. Plu-
sieurs centres hospitaliers de différents
réseaux ont une consultation spécialisée
de rhumatologie pédiatrique en Belgique.
A retenir
L'Arthrite Juvénile Idiopathique systémi-
que est peu fréquente (15% des AJI,
dont l'incidence globale est de +/-80
cas/100.000 enfants/an). Son diagnostic
est régulièrement difficile et requiert
l'expertise médicale. Il faut d'abord élimi-
ner d'autres diagnostics tels qu'une in-
fection sous-jacente par exemple, car il
n'existe pas de critère biologique spéci-
fique. Plusieurs signes cliniques bien
caractéristiques doivent être connus, per-
mettant de poser ce diagnostic dans les
situations plus atypiques, comme chez les
adolescents.
Les nouveaux traitements sont en train de
révolutionner la prise en charge des formes
sévères et réfractaires de la mala die, y
compris aux fortes doses de corti sone. Ces
nouveaux traitements biologiques ciblent
l'IL-1 et l'IL-6.
Leur utilisation doit être réservée aux mé-
decins expérimentés dans la reconnais-
sance diagnostique et dans la gestion des
effets secondaires rares mais potentielle-
ment sévères de ces nouveaux médica-
ments. Un exemple de situation piégeuse
est le diagnostic d'infection intercurrente,
car les anti IL-6 normalisent la CRP. Le but
ultime du traitement est la rémission cli-
nique prolongée, l'épargne corticoïde, une
croissance staturo-pondérale optimale
sans ostéoporose secondaire, ainsi qu'un
bon pronostic fonctionnel articulaire.
A l'heure actuelle, seul le tocilizumab est
remboursé dans cette indication.
Si vous souhaitez recevoir plus d'informations concernant l'utilisation et/ou le remboursement du RoACTEMRA dans l'Arthrite Juvénile Idiopathique systémique,
contactez N.V. Roche S.A. par téléphone au +32 2 525 82 83 ou par e-mail: brussels.ra@roche.com
Le remboursement du RoACTEMRA dans l'AJIs est effectif depuis le 01/04/2012 ,
chez des patients âgés de 2 ans et plus, atteints d'une AJIs active et remplissant
certaines conditions.
La dose doit être calculée en fonction du poids du patient et administrée en
perfusion IV de 1h, toutes les 2 semaines.
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Révolution dans le traitement
de l'Arthrite Juvénile Idiopathique
systémique (AJIs)
Une interview du Dr Jean-Jacques De Bruycker, pédiatre aux Cliniques Universitaires St-Luc et à la Clinique Saint-Pierre d'Ottignies
Au travers de la description d'un cas clinique, nous abordons le diagnostic difficile de l'AJIs ainsi que son
traitement. Plus particulièrement, ce cas montre les perspectives ouvertes par les nouveaux traitements
biologiques, comme RoACTEMRA®. Très efficaces, ceux-ci permettent maintenant d'éviter les traitements au
long cours par cortisone et leurs effets secondaires graves rencontrés par le passé.
Un diagnostic difficile
Marine, 15 ans, est hospitalisée pour
suspicion de lymphome. Ses antécédents
personnels et familiaux sont peu con-
tributifs.
Quatre mois avant son admission, une
éruption urticarienne couvre les mem-
bres, avec une prédominance vespérale.
Elle est cataloguée d'allergique mais ne
répond pas aux antihistaminiques. Des
arthralgies affectant les poignets, mains
et genoux apparaissent dans les semaines
qui suivent.
Les arthralgies deviennent invalidantes 3
mois après le début des symptômes. On
observe alors un gonflement des articu-
lations des extrémités avec des rougeurs
en fin de journée, ainsi qu'une fièvre ves-
pérale à 38,7°C, avec des céphalées. Du
Médrol® 32mg est prescrit et induit une
réponse cutanée mais pas articulaire.
L'augmentation de l'impotence fonction-
nelle et l'altération sévère de l'état général
avec anorexie et perte de poids nécessitent
une hospitalisation, en médecine interne
(elle a alors 16 ans). La biologie sanguine
montre un syndrome inflammatoire avec
15.000GB/mm
3
dont 80% de neutrophiles,
CRP 14mg/dl, élévation de la ferritine à
832µg/dl. Marine présente une éruption
fluctuante discrètement prurigineuse, mais
surtout douloureuse, qui s'accompagne
d'un fébricule vespéral, de grands états
d'abattement. L'examen physique montre
une enfant mince (45kg pour 170cm), des
adénopathies dures diffuses sans hépato-
splénomégalie. Un PET-scan est demandé
et met en évidence des adénopathies
hyper métaboliques diffuses médiastinales.
Une pathologie lymphomateuse est évo-
quée en raison de ces résultats, du reten-
tissement très important sur l'état général
et de l'absence d'éléments biologiques
pour un autre diagnostic. Cette hypothèse
est cependant invalidée après biopsie gan-
glionnaire par l'examen histologique qui
conclut à des adénopathies réactionnelles
inflammatoires.
Une maladie inflammatoire,
mais laquelle?
Le diagnostic d'Arthrite Juvénile Idiopathi-
que systémique (AJIs) ou maladie de
Still est suggéré par une fièvre quotidi-
enne avec un horaire caractéristique
pendant plus de 10 jours consécutifs,
mal tolérée, accompagnée de douleurs
inflammatoires articulaires, avec un état
général préservé entre les pics mais forte-
ment altéré durant ces derniers. Les signes
cliniques peuvent donc être discrets lors
de l'examen médical, entre deux pics fé-
briles, d'autant plus que les gonflements
articulaires ne sont pas nécessairement
démonstratifs au départ, car classique-
ment indolents. Le rash cutané classique
de couleur saumon est intermittent et af-
fecte plutôt la racine des membres, mais
peut atteindre leurs extrémités, comme
c'était le cas ici.
L'AJIs ou maladie de Still est une forme
rare (15%) d'Arthrite Juvénile Idio
pathique. Sa sémiologie est donc mal
connue. La maladie est plus fréquente
(2/3 des cas: enfant de moins de 5 ans)
et bruyante chez les petits enfants, moins
chez les grands et encore moins rencon-
trée chez le jeune adulte.
Si vous souhaitez recevoir plus d'informations concernant l'utilisation et/ou le remboursement du RoACTEMRA dans l'Arthrite Juvénile Idiopathique systémique,
contactez N.V. Roche S.A. par téléphone au +32 2 525 82 83 ou par e-mail: brussels.ra@roche.com
Dans l'AJIs, l'arthrite est indolente, on retrouve une raideur articulaire à la
mise en route, avec douleurs à l'arrière-plan. Elle est volontiers polyarticulaire
(> 5 articulations touchées). Ce sont les poussées de fièvre quotidienne durant
10 jours consécutifs (1 à 2 pics par jour, avec un horaire souvent caractéristique)
qui donnent à cette maladie son aspect théâtral classique. Un rash discret in-
termittent est caractéristique lors de la poussée fébrile, volontiers lenticulaire.
Ce rash précède parfois de plusieurs mois les autres manifestations. D'autres
symptômes classiques accompagnant le tableau clinique doivent être recher-
chés. Ils peuvent comprendre des douleurs musculaires, une hépatomégalie,
une splénomégalie, une hypertrophie des ganglions et une atteinte des séreu-
ses (pleurésie et péricardite parfois sévère).
L'AJIs n'a pas de marqueur sanguin spécifique (= arthrite par définition séro-
négative: les FR et FAN sont négatifs). La biologie montre un syndrome inflam-
matoire systémique, avec CRP et ferritine élevées, neutrophilie, hypergamma-
globulinémie, VS augmentée, anémie inflammatoire.
On observe une anorexie et une cassure de la courbe de croissance chez
les enfants affectés par la maladie parfois bien avant que le diagnostic ne soit
posé, liées à l'inflammation sous-jacente et ses multiples effets délétères sur le
métabolisme de l'enfant en croissance.
Le diagnostic est posé au 10
e
jour de fièvre, après élimination des autres
diagnos tics, entre autres les infections profondes, une pathologie tumorale, etc.
La mise en évidence d'arthrite permet de poser un diagnostic formel,
mais l'atteinte articulaire n'est pas rencontrée dans tous les cas, au départ.
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