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Pharma-Sphere 168
Novembre 2011
Cependant, les androgènes ne sont pas les seules hormones ayant
une influence sur les follicules sébacés. Citons les estrogènes, la
progestérone, la prolactine, l'hormone de croissance et la thyroxine.
Si leur influence est maintenant reconnue, leur rôle respectif sur la
glande sébacée normale reste néanmoins encore hypothétique.
Ceci est particulièrement mis en évidence chez la femme enceinte,
qui peut avoir une recrudescence d'acné pendant les deux pre-
miers mois de la grossesse, suivie d'une amélioration progressive
et spontanée. En revanche, d'autres parturientes voient s'installer
et s'aggraver une acné pendant toute la gestation alors que le cli-
mat hormonal n'est cependant pas nécessairement différent dans
ces deux groupes de femmes. Et d'autres faits ne trouvent aucune
explication dans une relation simple entre l'acné et les hormones.
L'influence des saisons et la guérison spontanée avec l'âge conti-
nuent de poser question.
Pas seulement une histoire d'hormones
Outre le caractère androgéno-dépendant de la séborrhée, la kéra-
tinisation de l'infundibulum du follicule pilosébacé est sous la dépen-
dance de l'isoenzyme type I de la 5-alpha-réductase, enzyme clé qui
transforme la testostérone en dihydrotestostérone, seul androgène
actif qui est augmenté chez les patients acnéiques.
Ainsi, les follicules pilosébacés sont les seuls où se développent
la lésion acnéique par opposition au velus folliculaire occupé par
un simple duvet et aux follicules terminaux, entre autres barbe et
cheveux. Mais seul un petit nombre de ces follicules participent au
processus acnéique, la plupart d'entre eux restant intacts de toute
lésion. Ces faits suggèrent l'existence d'une hétérogénicité intra-
et inter-individuelle considérable dans la réponse des follicules
sébacés aux androgènes. Ce qui pourrait donc distinguer un follicule
acnéique d'un autre resté normal serait l'intensité de la conversion
intracellulaire des androgènes circulants en leur métabolite actif
principal, la 5-alpha-dihydrotestoréone.
Le trouble de la kératinisation se produit au niveau de la partie
dermique de l'infundibulum avec une prolifération de l'épithélium
folliculaire aboutissant à la mise en rétention du follicule en aval.
Se forme alors le micro-comédon, lésion initiale de l'acné qui se
transformera ultérieurement en comédon soit fermé (microkyste),
soit ouvert (point noir), soit conduit au développement des lésions
papulaires, nodulaires ou kystiques.
De la stimulation androgénique, outre cette hyperplasie fonction-
nelle des glandes sébacées, il existe une colonisation infundibulaire
par le p-acnes, et l'expression de chimiotactisme des cellules in-
flammatoires avec formation des éléments inflammatoires.
Quels examens chez le dermatologue?
L'exploration hormonale des acnés ne doit pas être systématique.
En cas de résistance inhabituelle ou d'insuffisance des résultats
obtenus suite à un traitement dermatologique bien conduit, il faut
penser aux causes hormonales et prescrire un bilan minimum. Celui-ci
ne doit pas être fait sous traitement contraceptif puisque le blocage
des ovaires, et surtout les modifications de la SHBG induites par
les estrogènes de synthèse, durent plusieurs mois. Cet examen né-
cessite donc une fenêtre thérapeutique d'au moins trois mois chez
une patiente qui était entièrement sous contraceptifs oraux ou anti-
androgènes.
Sous ces conditions, cette mise au point est en pratique souvent
acceptée difficilement par les patientes.
Néanmoins, cette exploration peut donc être proposée chez la
femme adulte présentant une forme d'acné qui réapparaît pour la
première fois à l'âge adulte après s'être précédemment résolue
et qui ne réagit pas au traitement traditionnel contre l'acné, mais
s'aggrave pendant la grossesse ou les menstruations, en associa-
tion à de la pilosité, à une alopécie androgénétique, à l'apparition
d'un acanthosis nigricans ou à une obésité tronculaire. Les indica-
tions d'un déséquilibre hormonal peuvent nécessiter un examen
plus approfondi pour rechercher d'éventuelles anomalies au niveau
des glandes surrénales, des ovaires ou de l'hypophyse. Le diabète
peut influencer également l'équilibre hormonal androgénique.
Un traitement à visée hormonale
prescrit par les dermatologues
Le traitement de l'acné repose en première intention sur le traitement
dermatologique, mais l'association des traitements anti-androgènes
est d'autant plus indiquée qu'il existe une acné résistante au traite-
ment dermatologique classique, une acné non totalement guérie ou
qui rechute après une ou plusieurs thérapeutiques bien conduites.
Lorsque les glandes surrénales produisent trop d'androgènes, les
corticoïdes oraux peuvent contribuer à réduire cette production.
Lors d'acné sévère, ceux-ci sont également indiqués en raison de
leur activité anti-inflammatoire.
Les anti-androgènes constituent une seconde option. Ils limitent la
production d'androgènes par les ovaires et les glandes surrénales
et bloquent les récepteurs aux androgènes au niveau des glandes
sébacées. Les traitements hormonaux sont d'autant plus indiqués
qu'il existe d'autres signes d'hyperandrogénie sur lesquels les trai-
tements dermatologiques anti-acné ne sont pas efficaces, c'est-à-
dire lorsqu'il existe une alopécie androgénique ou, plus encore, un
hirsutisme. Cependant, les traitements hormonaux ont leurs limites,
puisqu'ils ne traitent pas la cause. Il existe par conséquent un risque
important de rechute après leur arrêt. Ils doivent donc être maintenus
plusieurs années en mettant au repos les ovaires, ce qui permet de
diminuer la production d'androgènes.
Dans tous les cas, il est important de déterminer le moment de la
mise en route d'un traitement pour éviter les séquelles, que sont
des cicatrices, d'une acné qui laisseront des traces indélébiles au
niveau de la peau, une chute des cheveux qui ne sera jamais récu-
pérée à 100%, un hirsutisme qui mettra des années à être corrigé.
Ces faits suggèrent l'existence d'une
hétérogénicité intra- et inter-individuelle
considérable dans la réponse des
follicules sébacés aux androgènes.