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OrthO-rhumatO | VOL 11 | N°5 | 2013
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pleine croissance. Toutes ces caractéristiques semblent as-
sez prometteuses, mais il faut admettre que la littérature sur
son utilisation chez les patients atteints de maladie rénale
chronique reste très limitée. Une étude a cependant montré
que le PINP était mieux corrélé que la PALO aux autres mar-
queurs de résorption osseuse. De même, une corrélation
négative est retrouvée entre PINP et les variations annuelles
de la densité osseuse au niveau du radius (61).
Les Beta-CrossLaps (CTX) sont des fragments formés suite
à la dégradation du collagène de type I et qui sont libérés
au cours de la résorption ostéoclastique. Le CTX est, par
exemple, utilisé pour suivre et évaluer l'efficacité d'un trai-
tement par bisphosphonates chez les patients atteints d'os-
téoporose. La diminution de CTX est d'ailleurs corrélée
avec une augmentation de la masse osseuse au cours d'un
tel traitement (62). Dans une étude de cohorte, prospective
et réalisée chez la femme âgée en France, la concentration
de CTX urinaire était associée à un risque accru de fracture
de la hanche, et ce indépendamment de la masse osseuse
(63). Dans la population générale, la concentration de CTX
présente un rythme circadien, avec une valeur plus élevée
en début de matinée (64). Cette variation nycthémérale est
réduite lors du jeûne.
Actuellement, la mesure des biomarqueurs de formation
et de résorption osseuses n'est pas recommandée dans les
KDIGO chez l'insuffisant rénal. La principale raison est
l'absence d'arguments forts qui démontreraient une vraie
plus-value de ces biomarqueurs par rapport à la PTH ou la
PALO pour estimer le remodelage osseux (1). Le coefficient
de variation analytique du dosage du CTX (Elecsys, Roche)
est inférieur à 2,6%. Cependant, les concentrations de CTX
observées chez le dialysé apparaissent 5 fois supérieures à
celles observées en population normale. Ceci est expliqué par
l'accumulation de CTX (diminution de l'excrétion rénale de
CTX) mais aussi par l'hyperparathyroïdie secondaire (65,66).
La diurèse résiduelle, l'efficacité et le moment de la dia-
lyse (matin ou après midi) ne semblent pas influencer les
concentrations sériques de CTX. Chez les patients dialysés,
la corrélation entre CTX et d'autres marqueurs, comme
l'ostéocalcine, la TRAP-5B, la PALO et la PTH, est signifi-
catif (67, 68). Un désavantage des CTX réside dans le fait
que ce fragment est dialysé, ce qui entraine une réduction
significative des concentrations de CTX après dialyse (69).
Les avantages du CTX sont la relative facilité de mesure
(automatisation) et l'absence d'interférence en cas de ma-
ladie hépatique.
En conclusion, TRAP-5B, PINP et CTX semblent être des
marqueurs prometteurs pour évaluer le remodelage os-
seux. Nous avons cependant besoin d'études supplémen-
taires, incluant la réalisation de biopsies osseuses, pour
valider l'intérêt de ces biomarqueurs en clinique dans
l'évaluation du remodelage osseux chez le sujet dialysé.
CoNClUSioN: dE la bioPSiE oSSEUSE
aU PraGMatiSME, dES étUdES traNSvErSalES
aUx étUdES loNGitUdiNalES
Nul ne peut contester l'intérêt de la biopsie osseuse pour
évaluer le remodelage osseux du patient dialysé. La biop-
sie est également importante dans l'optique de valider les
biomarqueurs. Du reste, les biomarqueurs ne sont que
des surrogate markers pour l'évaluation du remodelage
osseux. De plus, aucun biomarqueur n'est capable de pré-
dire avec précision un éventuel déficit de minéralisation
tel qu'observé dans la maladie osseuse urémique mixte
ou l'ostéomalacie, et ce même si ces deux types de lésions
osseuses sont moins fréquentes que l'ABD ou l'OF.
En pratique clinique, le recours à la biopsie osseuse pour
un diagnostic formel est cependant devenue rare vu l'uti-
lisation plus aisée des biomarqueurs. Un tel acte reste in-
diqué après une fracture et surtout avant d'envisager un
traitement par bisphosphonate chez le dialysé.
La nécessité d'avoir ce résultat de biopsie osseuse pour
valider l'utilisation clinique des biomarqueurs est cepen-
dant aussi la principale explication des incertitudes qui
subsistent quant à l'utilité de la plupart de ces biomar-
queurs. En effet, de grandes études multicentriques, avec
biopsie, sont encore nécessaires pour valider l'utilisation
de la plupart de ces biomarqueurs dans la prédiction du
remodelage osseux. D'ici là, nous en sommes réduits à une
certaine forme de pragmatisme. Dans la pratique quoti-
dienne, il nous reste à essayer d'interpréter au mieux les
biomarqueurs osseux proposés. Parmi ces biomarqueurs,
la PTH est encore la plus utilisée (y compris, d'ailleurs,
dans les essais cliniques étudiant les thérapies interve-
nant dans la gestion de la CKD-MBD). Pourtant, la PTH
n'est sans doute pas le meilleur biomarqueur du remode-
lage osseux, à la fois d'un point de vue physiologique (la
PTH est régulée par la calcémie et agit, seulement indi-
rectement, sur l'os) mais aussi d'un point de vue biolo-
gique (faible stabilité, DC trop élevée). Dans ce contexte,
nous ne pouvons qu'être d'accord avec la recommanda-
tion du KDIGO, qui propose de mesurer la PALO pério-
diquement chez le sujet dialysé. La PALO est un «vrai»
biomarqueur osseux. Son profil biologique semble aussi
meilleur, même si cela reste à confirmer. Nous avons
également discuté de l'intérêt potentiel d'autres biomar-
queurs osseux. Leur place dans le diagnostic et le suivi du
remodelage osseux doit cependant faire l'objet d'études
complémentaires. L'un des risques est de multiplier les
tests avec des coûts plus élevés et l'éventuelle possibili-
té d'obtenir des résultats discordants entre les biomar-
queurs, que ce soit en étude transversale mais plus encore
en étude longitudinale, lorsqu'on suit ces résultats chez
un même patient. En effet, et c'est une autre conclusion
importante de cet article, nous pensons qu'il est sans