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GUNAIKEIA
VOL 18 N°6
2013
hystéroscopie diagnostique lorsque celui-ci a été étudié.
En effet, aussi bien les études montrant une augmenta-
tion significative du risque d'essaimage intrapéritonéal
que celles n'en montrant pas sont d'accord sur le fait qu'il
n'y a pas plus de récidives à court terme (entre 25 mois
et 5 ans de suivi selon les études) et que les courbes de
survie globale et sans maladie sont superposables chez les
patientes souffrant d'un cancer de l'endomètre, qu'elles
aient eu une hystéroscopie diagnostique ou non avant le
traitement chirurgical de ce cancer.
La méta-analyse de Ya-Nan Chang
et al. (41) vient
conforter ces résultats et conclut que l'hystéroscopie
diagnostique préopératoire n'a aucune corrélation avec le
pronostic de la maladie.
Discussion
Au cours de cette revue de la littérature, deux probléma-
tiques ont été mises en évidence: d'une, part le risque de
retrouver des cellules néoplasiques dans la cavité périto-
néale après la réalisation d'une hystéroscopie diagnos-
tique; d'autre part, la conséquence du passage tubaire et
de la présence de ces cellules dans la cavité péritonéale sur
l'évolution du cancer de l'endomètre préexistant.
En ce qui concerne la première question, notre revue de la
littérature suggère qu'il existe une augmentation signifi-
cative du risque de dissémination de cellules néoplasiques
dans la cavité péritonéale après la réalisation d'une hys-
téroscopie diagnostique. Mais comme on a pu le voir, de
nombreux facteurs interviennent et pourraient moduler
ce risque. En effet, le milieu de distension utilisé dans
la majorité de ces études est un liquide isotonique, mais
qu'en est-il du CO
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, qui ne fait pas partie des pratiques
courantes? Les différences de pression intra-utérine uti-
lisées d'une étude à l'autre semblent également jouer un
rôle. Le délai entre la réalisation de l'hystéroscopie et le
prélèvement de liquide péritonéal au moment de la sta-
dification chirurgicale n'est quasiment jamais mentionné
dans les études reprises ici, mais on peut se poser la ques-
tion de savoir si cette durée n'a pas une influence sur les
taux de cytologie péritonéale positive.
Par ailleurs, les études retrouvées dans la littérature sont
le plus souvent incomplètes en ce qui concerne les diffé-
rents protocoles utilisés (calibre des hystéroscopes, dila-
tation avant l'hystéroscopie ou non, milieu de distension,
pression intra-utérine, stade, grade, type histologique des
cancers et proportion de chacun d'eux, délai entre l'acte
diagnostique et la stadification chirurgicale, statut cyto-
logique péritonéal avant l'hystéroscopie,...). Des études
prospectives randomisées, avec des effectifs plus impor-
tants et des modalités protocolaires plus strictes, pour-
raient sans doute permettre de répondre à cette question
avec une moins grande discordance de résultats.
En ce qui concerne notre deuxième problématique, la
conclusion des études selon laquelle le pronostic du cancer
de l'endomètre n'est pas modifié par la réalisation d'une
hystéroscopie diagnostique préopératoire va dans le sens
de la modification de la classification FIGO de 2009, à sa-
voir qu'une cytologie péritonéale positive isolée en cas de
cancer limité au corps utérin n'a pas de valeur pronostique
aggravante en elle-même sur la maladie néoplasique.
À partir de de cette constatation, des auteurs s'interrogent
sur le devenir de ces cellules néoplasiques déposées passi-
vement dans la cavité péritonéale et se retrouvant isolées
dans un environnement péritonéal aux capacités immuno-
suppressives peu connues. Prolifèrent-elles? S'implantent-
elles? Sont-elles détruites par le système immunitaire?
Certains auteurs tels que Biewenga émettent l'hypothèse
que la présence des cellules néoplasiques retrouvées dans
la cavité péritonéale après une hystéroscopie n'est que
transitoire et que cette cytologie redevient négative après
une certaine période. D'autres suggèrent que ces cellules
restent viables une fois dans la cavité péritonéale et ont
la capacité de se fixer; c'est en tout cas ce qu'Arikan
et al.
(46) ont montré
in vitro. Des études futures doivent être
réalisées pour que l'on puisse répondre à ces questions.
Conclusion
La réalisation d'une hystéroscopie diagnostique en cas
de cancer de l'endomètre semble augmenter de façon
significative le risque de cytologie péritonéale positive
au moment de la stadification chirurgicale. Ce risque
semble toutefois moindre en cas d'utilisation de pression
intra-utérine basse (inférieure à 100mmHg) et augmenté
en cas de cancer avancé à un stade extra-utérin. Le pro-
nostic du cancer quant à lui ne semble pas être modifié à
court terme (5 ans) par la réalisation d'une hystéroscopie
diagnostique préopératoire. Cette conclusion est confor-
tée par la modification de la classification de la FIGO du
cancer de l'endomètre en 2009, qui ne considère plus la
cytologie péritonéale positive comme un facteur de mau-
vais pronostic et ne surclasse plus la maladie néoplasique
en stade IIIa en cas de cancer limité au corps utérin associé
à une cytologie péritonéale positive isolée.
De façon raisonnable, nous pouvons conclure que l'hys-
téroscopie diagnostique a toute sa place dans la stratégie
diagnostique du cancer de l'endomètre avec les avantages
de la vision directe (aspect macroscopique, biopsie dirigée
et évaluation de l'extension cervicale) sans les risques as-
sociés à un examen invasif pouvant nécessiter une anes-
thésie générale ou loco-régionale et sans que le pronostic
de la maladie néoplasique soit modifié par sa réalisation.
Cette dernière doit toutefois respecter des conditions de
sécurité optimales vis-à-vis du risque d'essaimage périto-
néal et ainsi être effectuée à une pression intra-utérine la
plus basse possible (40 à 80mmHg), uniquement en cas de
suspicion de stade débutant de cancer de l'endomètre et
elle devra durer le moins longtemps possible.
Ce texte (références comprises) se trouve sur le site web de Gunaïkeia (www.gunaikeia.be).