30
GUNAIKEIA
VOL 18 N°8
2013
On observe une répartition bimodale par tranche d'âge dans
l'incidence du CCV, à la suite ou non d'une utilisation mater-
nelle de DES (3, 5). Cela s'explique par le rôle de la ménarche
et de la ménopause, qui tendent à favoriser la carcinogenèse,
et/ou l'existence d'une sous-population présentant des fac-
teurs de risque génétiques ou exogènes autres que l'exposi-
tion au DES (3). Les autres facteurs de risque connus du CCV
sont l'obésité et l'utilisation d'estrogènes (6, 7).
Les patientes positives au DES ont un meilleur pronostic de
survie et développent moins souvent des métastases que
les patientes négatives au DES (8). Les autres facteurs pro-
nostiques sont le stade et l'âge, le pronostic de survie étant
significativement moins favorable de 50 à 74 ans et dans les
cas où le CCV a atteint un stade FIGO III ou plus élevé (9, 10).
La survie à 5 ans pour l'ensemble des stades s'élève à 78%, et
à 87% (vagin) et 91% (col) au stade I (11).
Le schéma de formation de métastases du CCV est différent
de celui du carcinome épidermoïde (CE): le CCV se métastase
plus tard et entraîne plus de métastases à distance que le
CE (1). Les organes les plus touchés par les métastases sont
les poumons (36%) et le bassin, les ganglions lymphatiques
para-aortiques et sous-claviculaires (20%), outre les réci-
dives locales dans le bassin (60%) (11-13), mais dans certains
cas, le CCV peut s'étendre au foie, au cerveau, au péritoine, à
l'épiploon et à l'ovaire (14-17). Nous n'avons trouvé aucune
étude de cas mentionnant une métastase dans la paroi abdo-
minale chez des patientes atteintes de CCV. Cette pathologie
exige un suivi long et minutieux, car les récidives sont tar-
dives, parfois jusqu'à 19 ans après le premier diagnostic (1).
Les groupes de patientes sont en général trop réduits pour
émettre des conclusions sur la meilleure stratégie de traite-
ment, mais la chirurgie radicale semble apporter les meilleurs
résultats. Cela n'a rien d'étonnant quand on sait que 16%
des CCV de stade I présentent des ganglions lymphatiques
pelviens positifs (11). Dans la littérature, nous n'avons trouvé
aucune corrélation entre les treillis posés dans la paroi abdo-
minale et les récidives tumorales des carcinomes pelviens.
Personne n'a encore prouvé que la chimiothérapie permet-
tait une réponse significative, mais nous avons recensé des
études de cas où ce traitement a effectivement joué un rôle
dans l'évolution de la maladie (11). Étant donné que la valeur
des cytostatiques en cas de CCV n'a pas été prouvée, nous
avons décidé de ne pas l'ajouter au traitement (du moins
pour l'instant).
Les patientes ayant subi une radiothérapie combinée externe
et intracavitaire ou interstitielle bénéficient d'un meilleur
pronostic en termes de contrôle local de la maladie et de
survie que les patientes n'ayant été traitées que par des
méthodes interstitielles (18). Dans une étude, des patientes
de stade I traitées par radiothérapie combinée n'ont mon-
tré aucune nouvelle rechute, contre 50% de récidives chez
les patientes qui n'avaient reçu qu'une radiothérapie locale
(18). La radiothérapie doit faire partie du traitement si seule
une excision locale a été réalisée, car on obtient alors une
diminution de l'incidence des rechutes à 10 ans (19).
Le traitement des récidives est généralement chirurgical;
60% de ces patientes ne présentent plus de maladie dans
les 3 à 10 ans suivant l'opération (11). Lors d'une étude, une
radiothérapie a été administrée à 3 patientes: l'une d'elles
n'a plus présenté de maladie durant 79 mois, une autre a
redéveloppé des récidives et la dernière, qui avait reçu une
radiothérapie après une chirurgie, a connu un intervalle de
63 mois sans maladie (11).
Conclusion
Nous avons décrit un cas rare de CCV avec récidive tardive
dans la paroi abdominale. La faible population de patientes
ne permet pas d'énoncer un traitement standard. Toute-
fois, des études affichent de bons résultats en matière de
pronostic lorsqu'une récidive est traitée chirurgicalement,
dans certains cas complétée par une radiothérapie. Notre
patiente avait vécu 5 ans sans maladie après sa première
récidive, ce qui prouve qu'un suivi minutieux est néces-
saire car les rechutes peuvent être tardives, malgré un bon
pronostic en cas de CCV limité. De nouvelles études sont
nécessaires pour établir un traitement standard du CCV
et de ses récidives, mais selon la littérature, la chirurgie
radicale avec radiothérapie locale semble être la meilleure
option pour le CCV de faible grade.
Références
1.
Fishman DA, Williams S, Small W Jr, et al. Late recurrences of vaginal clear cell
adenocarcinoma. Gynecol Oncol 1996;62:128-32.
2.
Herbst AL, Ulfelder H and Poskanzer DC. Association of maternal stilbestrol therapy with
tumor appearance in young women. N Engl J Med 1971;284:878-81.
3.
Hanselaar A, van Loosbroek M, Schuurbiers O, Helmerhorst T, Bulten J, Bernheim J. Clear
cell adenocarcinoma of the vagina and cervix. An update of the Central Netherlands
Registry showing twin age incidence peaks. Cancer 1997;79:2229-36.
4.
Herbst AL, Cole Ph, Norusis MJ, Welch WR, Scully RE. Epidemiologic aspects and factors
related to survival in 384 registry cases of clear cell adenocarcinoma of the vagina and
cervix. Am J Obstet Gynecol 1979;135:254-5.
5.
Smith EK, White MC, Weir HK, Peipins LA, Thompson TD. Higher incidence of clear cell
adenocarcinoma of the cervix and vagina among women born between 1947 and 1971 in
the United States. Cancer Causes Control 2012;23:207-11.
6.
Shah C, Pizer E, Veljovich DS, Drescher CW, Peters WA, Paley PJ. Clear cell adenocarcinoma
of the vagina in a patient with vaginal endometriosis. Gynecol Oncol 2006;103:1130-2.
7.
Sharp GB, Cole Ph. Identification of risk factors for diethylstilbestrol-associated clear
cell adenocarcinoma of the vagina: similarities to endometrial cancer. Am J Epidemiol
1991;134(11):1316-24.
8.
Waggoner SE, Mittendorf R, Biney N, Anderson D, Herbst AL. Influence of in utero
diethylstilbestrol exposure on the prognosis and biologic behavior of vaginal clear cell
adenocarcinoma. Gynecol Oncol 1994;55:238-44.
9.
van der Aa MA, Helmerhorst ThJM, Siesling S, Riemersma S, Coebergh JW. Vaginal and
(uncommon) cervical cancers in the Netherlands, 1989Y2003. Int J Gynecol Cancer
2010;20:638-45.
10. Hanselaar AGJM, Van Leusen NDM, De Wilde PCM, Vooijs GP. Clear cell adenocarcinoma
of the vagina and cervix. A report of the Central Netherlands Registry with emphasis on
early detection and prognosis. Cancer 1991;67:1971-8.
11. Herbst AL, Norusis MJ, Rosenow PJ, Welch WR, Scully RE. An analysis of 346 cases of clear
Cell adenocarcinoma of the vagina and cervix with emphasis on recurrence and survival.
Gynecol Oncol 1979;7:111-22.
12. Watanabe Y, Ueda H, Nozaki K, et al. Advanced primary clear cell carcinoma of the vagina
not associated with diethylstilbestrol. Acta Cytol 2002;46(3):577-81.
13. Alipour P, Arjmandi K, Hallaji F. Vaginal clear cell adenocarcinoma with early pulmonary
metastasis in a child. Pediatr Hematol Oncol 2008;25(7):679-84.
14. van Ruth S, van Dorst EBL, Canninga-van Dijk MR, de Bruin-Weller MS. A leg ulcer as
manifestation of metastatic squamous cell vaginal carcinoma. JEADV 2006;21:678-80.
15. Saruk M, Olsen TG, Lucky PA. Metastatic epidermotropic squamous cell carcinoma of the
vagina. J Am Acad Dermatol 1984;11:353-6.
16. Lin LM, Sciubba DM, Gallia GL, Sosnowski J, Weingart JD. Diethylstilbestrol (DES)-induced
clear cell adenocarcinoma of the vagina metastasizing to the brain. Gynecol Oncol
2007;105:273-6.
17. Robboy SJ, Herbst AL, Scully RE. Clear-cell adenocarcinoma of the vagina and cervix in
young females: analysis of 37 tumors that persisted or recurred after primary therapy.
Cancer 1974;34(3):606-14.
18. Macnaught R, Symonds RP, Hole D, Watson ER. Improved control of primary vaginal
tumours by combined external-beam and interstitial radiotherapy. Clin Radiol
1986;37:29-32.
19. Senekjan EK, Frey KW, Anderson D, Herbst AL. Local therapy in stage I clear cell
adenocarcinoma of the vagina. Cancer 1987;60:1319-24.