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l
Neurone
·
Vol 18
·
N°1
·
2013
Des différences ont été constatées non
seulement au niveau de la substance
grise du cerveau, mais également au ni-
veau de la substance blanche. Il s'est
avéré que les hommes pédophiles possè-
dent certaines régions de substance
blanche de volume significativement
moindre (15). De telles anomalies font
supposer que les pédophiles, outre leur
comportement sexuel déviant, auraient
encore d'autres symptômes addition-
nels. Et effectivement, comme il a déjà
été mentionné, ces hommes font de
moins bons résultats aux tests de QI,
leurs prestations au niveau des tâches
visuelles, spatiales et verbales de la mé-
moire sont plus faibles, et leurs presta-
tions scolaires sont plutôt médiocres.
Plusieurs études intéressantes ont étudié
l'older brother effect, le constat que le
risque de pédophilie augmente avec le
nombre de frères aînés. Ce phénomène a
été remarqué pour la première fois chez
des hommes homosexuels non pédo-
philes, pour lesquels on a constaté qu'ils
avaient significativement plus souvent
plusieurs frères aînés. Le risque d'homo-
philie augmenterait même d'un tiers
pour chaque frère aîné supplémentaire.
On s'est demandé si c'était le cas égale-
ment pour les hommes pédophiles. Une
étude de Blanchard et al. (16) a comparé
260 pédophiles à 260 contrôles. Elle a
constaté une corrélation, les pédophiles
homosexuels (des pédophiles avec une
préférence spécifique pour les garçons)
ayant plus souvent plusieurs frères aînés.
Une explication hypothétique de ce
birth order effect ou effet de la suite des
naissances pointe en direction d'un
trouble de maturation des circuits céré-
braux. Dans certains cas, chez la femme
multipare, du sang embryonnaire passe-
rait dans le réseau sanguin maternel,
provoquant ainsi une réaction immuni-
taire. Des anticorps seraient formés
contre les protéines (l'antigène H-Y étant
un candidat) qui sont le produit de gènes
sur le chromosome Y foetal masculin, qui
bien entendu sont étrangers au corps de
la mère. Ce processus entraînerait une
perturbation au niveau du développe-
ment neuronal et expliquerait ainsi le
comportement sexuel déviant. Malgré
cette explication très plausible, il existe
des études épidémiologiques qui n'ont
pas constaté cet older brother effect. Des
preuves scientifiques irréfutables, par
exemple sous forme d'anticorps mater-
nels dirigés contre ces protéines, n'ont
jamais été apportées.
Une autre étude de Blanchard et al., qui
examine des problèmes de développe-
ment neurologique comme cause de la
pédophilie, est également intéressante
(17). Ce groupe de chercheurs a examiné
1.206 pédophiles, lesquels rapportaient
remarquablement souvent qu'ils avaient
subi un traumatisme de la tête dans leur
prime enfance (avant l'âge de 13 ans)
avec perte de conscience. En ce qui
concerne les traumatismes chez l'adulte,
contrairement aux traumatismes subis
avant la puberté, il n'y aurait pas d'asso-
ciation avec la pédophilie. Le constat
que de tels traumatismes de la tête à un
jeune âge pourraient constituer un fac-
teur de risque de comportement pédo-
phile, rendent le problème d'autant plus
intéressant, mais également plus com-
plexe. L'hypothèse proposée dans cette
étude est que ces traumatismes de la tête
durant les années de jeunesse ­ portant
atteinte au développement dans une
phase critique de la maturation du cer-
veau ­ entraîneraient une perturbation
du développement et aboutiraient à une
attirance sexuelle orientée vers les en-
fants. Cette théorie doit encore être
confirmée.
Concluons que, malgré les liens évidents
entre fonction aberrante de certaines ré-
gions du cerveau d'une part et compor-
tement sexuel aberrant d'autre part, la
littérature n'a toujours pas fait état d'une
quelconque «lésion pédophile» prouvée
au niveau du cerveau (18). Les deux der-
nières études mentionnées de Blanchard
et al. ont essayé de mieux comprendre la
question étiologique en s'intéressant au
problème de la maturation du cerveau
qui entraînerait un trouble précoce du
développement neurologique.
Une recherche plus ciblée pour appuyer
cette théorie est en tout cas nécessaire.
Etiologie: facteurs sociaux et
environnementaux
Certains facteurs environnementaux
peuvent contribuer à poser des actes
pédophiles. Les pédophiles rapportent
souvent que le stress est un facteur qui
aggrave leurs tendances ou désirs (5).
Mais certains facteurs environnemen-
taux seraient-ils également impliqués?
Depuis un certain temps, les abus subis
Plusieurs études intéressantes
ont étudié «l'older brother
effect», le constat que le
risque de pédophilie
augmente avec le nombre de
frères aînés.
Malgré les liens évidents entre fonction aberrante de certaines
régions du cerveau d'une part et comportement sexuel aberrant
d'autre part, la littérature n'a toujours pas fait état d'une
quelconque «lésion pédophile» prouvée au niveau du cerveau.