background image
45
l
Neurone
·
Vol 17
·
N°7
·
2012
a été de faire de la recherche clinique.
Le FNRS lui a été d'un soutien remar-
quable. «Je veux le souligner; je lui en
ai gardé une reconnaissance infinie.
Lorsque le recteur de l'ULg m'a proposé
de m'intéresser au cyclotron médical,
qui disposait à cette époque d'un scan-
ner d'imagerie fonctionnelle, appelé
scanner à positon, j'ai immédiatement
saisi l'occasion: nous sommes ainsi de-
venus l'un des premiers spécialistes en
Belgique dans ce type d'imagerie fonc-
tionnelle. Nous avons commencé évi-
demment à travailler sur l'épilepsie et le
sommeil... Liège est devenu un des
centres de référence sur le sommeil et
l'épilepsie grâce à nos collaborateurs,
P. Maquet, actuellement directeur de re-
cherche au FNRS, R. Poirrier, directeur
de l'Unité de recherches sur le sommeil
normal et pathologique et B. Sadzot,
aujourd'hui chef de service associé en
neurologie
».
Le Pr Franck précise qu'il a chaque fois
poussé ses collaborateurs à faire une
thèse de doctorat, et ensuite une thèse
d'agrégation de l'enseignement supé-
rieur. Autant dire que ceux qui refusaient
de subir ses conseils étaient priés de
quitter son service, c'était la règle. «Nous
avons ainsi contribué à faire nommer
une dizaine d'agrégés de l'enseignement
supérieur à l'ULg; parmi ceux-ci, 6 sont
devenus chargé de cours ou professeur
d'université
».
C'est ainsi que le Professeur Franck étu-
dia le débit sanguin, le métabolisme du
glucose, la consommation d'oxygène au
niveau du cerveau, grâce au scanner à
positon et ensuite à la résonance magné-
tique nucléaire. Son service eut la
chance de disposer d'un cyclotron médi-
cal et des scanners à positon et à réso-
nance magnétique nucléaire indépen-
dants de l'hôpital, grâce aux Fonds de
l'université, au Fonds national de la Re-
cherche scientifique, aux crédits de la
Fondation Reine Elisabeth, des PAI (Pôles
d'attraction interuniversitaire) rattachés
aux services du Premier Ministre, et de
fonds internationaux. «En épileptologie,
ces techniques d'imagerie permirent de
montrer que les "foyers" épileptiques du
cortex cérébral se caractérisaient par un
hypométabolisme cellulaire et un hy-
podébit vasculaire. Ces particularités se
révélèrent très intéressantes dans le repé-
rage cérébral de ces foyers et ainsi, dans
leur approche neurochirurgicale (exci-
sion). Dans le cadre des études sur le
sommeil, nous fûmes parmi les tout pre-
miers à montrer que le sommeil "lent",
le plus réparateur sur le plan physique
(ondes lentes à l'électroencéphalo-
gramme) s'accompagnait d'un hypomé-
tabolisme et d'un hypodébit vasculaire
global du cerveau. A l'opposé, le som-
meil "rapide" (ondes rapides à l'E.E.G.)
encore appelé sommeil à mouvements
oculaires (REM des auteurs anglo-
saxons), ou sommeil des rêves, se distin-
guait par un métabolisme et un débit
sanguin élevés, du même ordre de gran-
deur que le cerveau "éveillé", alors que
le sujet est profondément endormi (som-
meil encore appelé "paradoxal")
».
«J'ai eu en fait beaucoup de chance
puisque, dans sa grande largesse (!), la
faculté m'avait donné au départ un
électroencéphalogramme qui venait
du secteur de neurologie que je diri-
geais au département de médecine in-
terne et un appareil d'E.E.G. portable
fourni par un de mes maîtres, le Pr Joël
Bonnal, célèbre neurochirurgien qui
formera par ailleurs le Pr Jacques
Brotchi (ULB). Cela m'a permis de par-
tir de zéro et dès lors, de pouvoir choi-
sir mes collaborateurs et progressive-
ment de faire l'achat d'outillages très
performants. Nous sommes devenus
un des services les mieux fournis de
toute la Belgique. Je le dis sans fausse
prétention car c'est la vérité... Nous
avons développé des équipes de re-
cherche très compétentes sur des sujets
plus divers, tels que les mouvements
anormaux, les maladies dégénératives
et les grandes fonctions cognitives (la
mémoire...), en particulier avec le pro-
fesseur Eric Salmon. Nous avons ac-
cueilli de nombreux chercheurs étran-
gers et belges, notamment Steve Lau-
reys, qui est resté à Liège et a fait une
très belle carrière
».
Aujourd'hui retraité, le Pr Franck garde
un excellent souvenir de ses étudiants,
en particulier de son dernier cours à
l'ULg où ceux-ci lui ont offert la penne
(casquette des étudiants) et un magni-
fique livre sur l'un de ses peintres pré-
férés, Alechinsky. Un souvenir émou-
vant auquel il ne s'attendait absolu-
ment pas. «Quoique mon cours était
très lourd, je mimais des crises d'épi-
lepsie et d'autres symptômes tels que
les mouvements anormaux, ce qu'ils
appréciaient beaucoup. J'ai appris ces
mimiques avec mon maître Gastaut
car, quand j'étais de garde et que je
rapportais un cas de crise d'épilepsie,
il me disait: «Franck, je m'en fous, mi-
mez-la moi!». Ce que je faisais. J'avais
un peu un don d'acteur!
».
Le FNRS m'a été d'un
soutien remarquable.
Nous fûmes parmi les tout premiers à montrer que
le sommeil "lent" s'accompagnait d'un hypométabolisme
et d'un hypodébit vasculaire global du cerveau.