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I
Le Spécialiste
13-11
19 juin 2013
www.lespecialiste.be
L
e système chapeauté par l'associa-
tion interhospitalière traduit une
évolution dans la répartition de la
charge de travail entre lignes de soins, au-
delà des traditionnels clivages concurren-
tiels. C'est la consécration en taille XL d'un
projet-pilote local courant depuis fin 2011
(lire encadré ci-contre). Pour le patient lié-
geois en quête d'un médecin, aucun bou-
leversement tangible. Il compose, comme
avant, le numéro du généraliste de garde
dans son coin. Lequel aura (s'il le désire)
dévié sa ligne à partir de 22h et jusqu'au
lendemain 7h, y compris en semaine, vers
le dispatching.
A l'autre bout du fil, le répondant est donc
un intervenant hospitalier, en l'occurrence
un infirmier SIAMU spécifiquement formé.
Soit un professionnel dont l'expérience
dépasse celle d'un préposé au 100 et,
incontestablement, celle d'un opérateur
de télésecrétariat comme en mandatent
souvent les rôles de garde de généralistes.
Cet infirmier trieur s'appuie sur un algo-
rithme fort de plus d'une cinquantaine
de situations cliniques pour déclencher,
selon les symptômes dépeints, la prise en
charge la plus adéquate.
Il y a quatre grandes possibilités, schéma-
tise Edmond Brasseur, urgentiste liégeois
chef de projet. S'il y a urgence vitale, on
envoie selon le cas, en triangulation avec
le 112, un SMUR, un PIT (une ambulance
avec un infirmier spécialisé en soins inten-
sifs et d'urgences, ndlr) ou une ambulance.
Si l'urgence est moindre mais qu'une mise
au point hospitalière s'impose, l'appelant
est invité à se présenter à l'hôpital ­ de
son choix ­, véhiculé par ses proches ou
par un taxi sanitaire léger. Pour les pro-
blèmes relevant de la médecine générale,
le dispatching contacte lui-même le MG
de garde; il s'ensuit une consultation ou
une visite à domicile selon la mobilité du
patient. Enfin, quand la situation n'exige
manifestement pas d'intervention rapide,
le patient est prié de contacter son méde-
cin traitant au petit matin.
En perfectionnement
perpétuel
Le Dr Brasseur opère un rétrocontrôle per-
manent de cet aiguillage. «On réécoute
les échanges entre l'appelant et l'infirmier,
on questionne patients et médecins, de
façon à affiner nos algorithmes en temps
réel, ou presque.»
Tous les cas envisagés
dans les protocoles n'ayant pas encore
été rencontrés, le médecin continue de
considérer le système, malgré son exten-
sion imminente, comme expérimental.
D'après les constats opérés jusqu'ici, la
formule allie fiabilité et coût modéré (*).
Les interventions des MG de garde de nuit
diminuent de 40%. Ils sont soulagés tant
de la «bobologie» qui peut attendre que
des urgences vitales qui ne le peuvent pas
(et face auxquelles, de toute façon, ils sont
bien impuissants...). Les moyens AMU ne
sont pas mobilisés indûment. La mise au
point hospitalière pour les urgences rela-
tives ­ une option made in Liège absente
du modèle 1733 du SPF Santé publique ­
s'avère justifiée dans l'immense majorité
des cas. Et quand des patients s'y refusent,
exigeant mordicus le passage d'un géné-
raliste, il s'avère que ce dernier est quand
même, en général, amené à les... adresser
à l'hôpital!
Cinq hôpitaux et sept-huit
cercles
L'association de fait concerne cinq éta-
blissements et chacun de leurs multiples
sites: le CHC, le CHR de la Citadelle, le
CHU de Liège, le CH du Bois de l'Abbaye
et le CHR de Huy. «Physiquement», la
régulation reste au CHU, mais tous vont
contribuer à sa bonne organisation et à
son financement. Le dispatching n'inclura
pas le centre ville, où opère de longue date
un poste de garde de médecine générale,
ni pour l'instant les hôpitaux de Verviers.
«La porte n'est pas fermée...», précise le
Dr Brasseur. Côté généralistes, le cercle
d'Hannut avait déjà rejoint en janvier
2013 son homologue pionnier du Condroz
(lire ci-contre). Cinq autres entités vont
prendre le train en marche, en bloc, au 1
er
juillet ­ les cercles de Seraing et environs,
Ans/Alleur/Loncin, Chaudfontaine/Chê-
née/Trooz, Waremme et environs et Medi-
case (Amay, Engis, Saint-Georges-s/M.)
­ et une sixième se tâte. Cela fera, selon
la géométrie qui émergera, de 300.000 à
330.000 habitants couverts.
Claire Meurisse
* Plusieurs infirmiers SIAMU avaient été formés
pour le projet Condroz. Recevant 0,8 appel par
nuit pour 30.000 habitants, ils les géraient en
marge de leurs activités aux urgences. L'exten-
sion va changer la donne. L'association envisage
d'affecter spécifiquement un infirmier à la tâche,
avec local dédié. L'addition annuelle, comprenant
une pause infirmière de nuit soit 2,1 ETP nursing
et 0,5 ETP secrétaire, se chiffre à 157.000.
JS0658F
Régulation des appels à la garde:
Liège joue collectif
Une association de fait unit depuis peu le gros des hôpitaux
liégeois (CHC, la Citadelle, CHU, Bois de l'Abbaye et Huy) dans
l'organisation, à coûts partagés, d'une régulation des appels
de nuit que reçoit la médecine générale. Selon le problème de
l'appelant, la réponse médicale est hospitalière ou ambulatoire.
Sept cercles de généralistes de la périphérie ouest, jusqu'aux
confins de Namur et du Brabant, seront sous peu intégrés
dans l'écrémage téléphonique collectif. Population desservie:
quelque 300.000 habitants.
Rétroactes
Le dispositif commun qui
s'annonce est l'aboutissement
d'un projet-pilote entre le cercle
du Condroz et le CHU. Les MG
condruziens, en raréfaction, forcés
d'enchaîner les gardes à cadence
infernale, envoyaient des signaux
de détresse. L'hôpital les a captés
et, servi par son statut univer-
sitaire et le support logistique,
informatique... offert par l'ULg,
a façonné avec eux une solution
inédite de filtrage téléphonique.
Elle repose sur des algorithmes
originaux, conçus sous la houlette
du Dr Brasseur et inspirés du
manuel de régulation français et
des protocoles en gestation dans
le cadre du 1733. Les généralistes
avaient également trouvé pour
partisans actifs les Drs Leclercq et
Dusart, respectivement généraliste
et urologue, mais également, à
l'époque, à la tête de l'Ordre lié-
geois. Ce dernier a explicitement
soutenu la formule novatrice qui
s'est concrétisée à l'automne
2011.
LA VIE DES HÔPITAUX
L'infirmier trieur s'appuie sur un algorithme fort de
plus d'une cinquantaine de situations cliniques pour
déclencher, selon les symptômes dépeints, la prise en
charge la plus adéquate.