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GUNAIKEIA
VOL 18 N°9
2013
élevée nulle part au point d'arriver à un gouvernement ré-
gulier, ni a la moindre apparence de connaissances suivies,
n'a conservé nulle part d'annales ni de tradition.»
C'est en réponse à cette vision que Bessora (5) a publié
son livre
53cm ­ un titre qui fait référence à son propre
tour de hanches pour dénoncer les classifications raciales
basées sur des mensurations. L'auteur y affirme non sans
un certain humour que
«Plus ses fesses sont grosses, plus
la femme est noire, moins elle est humaine, car elle est trop
sexy et que la noirceur trouble forcement I'ordre public. Si
le périmètre horizontal de ta croupe fait 678 millimètres,
tu es une femme wolof, s'il fait 644 millimètres, tu es euro-
péenne. Si l'amplitude moyenne de ta croupe représente
trois et demi pour cent de ta taille, tu es française!»
Il est assez curieux de constater que vers la même époque,
la stéatopygie a fait dans le domaine de la mode féminine
l'objet d'un certain engouement, matérialisé par ce que
l'on appelait alors la
«queue de Paris» (Figure 5). Celle-ci
semble avoir été en partie une réaction à la période des
crinolines à larges hanches, mais il n'est pas interdit de
penser que la popularité de la Vénus hottentote y ait éga-
lement été pour quelque chose...
Les fesses proéminentes de la Belle Époque correspondent
à une période où on refoule la vision du sexe. Du coup, le
sexe ressort ailleurs, il est comme transfiguré dans le faux
cul (6).
Figure 5: Au 19
e
siècle, les postérieurs hypertrophiés ont
connu leur heure de gloire dans la mode féminine avec la
«
queue de Paris».
Figure 7: Léda et le cygne, relief en marbre, 2
e
siècle après
J.-C., Musée National, Athènes.
Figure 6: Dans l'Égypte ancienne, la reine du Pount
(l'actuel Soudan) était représentée avec une stéatopygie
marquée.
Dans ses
Mémoires du Diable (1849), Paul Féval écrit à ce
sujet que
«Des formes impossibles et immorales, tendant et
balançant des formes qu'elle n'a pas, qu'elle exagère impu-
demment au-delà des proportions de la Vénus callipyge.»
L'Antiquité égyptienne, grecque et romaine
La tendance des femmes noires à présenter une stéatopy-
gie n'avait pas échappé aux artistes de l'Égypte ancienne,
qui représentaient traditionnellement la reine du Pount
(l'actuel Soudan) avec un arrière-train fortement déve-
loppé (
Figure 6).