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GUNAIKEIA
VOL 18 N°7
2013
Cas n° 2
Mme M. G. S. est âgée de 32 ans; c'est une 4
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geste 2
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pare, elle a eu 2 enfants vivants, 2 fausses couches, accou-
chement par voie basse. Dans ses antécédents, on note
une endométriose de stade 4, une dysplasie sévère du col
surveillée (dernier frottis normal), une appendicectomie et
une cure d'hernie inguinale à l'âge de 3 ans. La patiente
présente une histoire de douleur pelvienne chronique ne
répondant pas aux antalgiques habituels; au toucher vagi-
nal, l'utérus est douloureux à la mobilisation. L'échogra-
phie pelvienne endovaginale est normale. Une exploration
chirurgicale par chromolaparoscopie pour cure d'endo-
métriose a été réalisée; le constat opératoire montre un
cul-de-sac de Douglas oblitéré par des adhérences et des
pseudo-kystes d'endométriose. L'ovaire droit présente un
implant d'endométriose, le gauche étant normal. L'utérus
présente de multiples pseudo-kystes sur le fond utérin et
sur sa face postérieure (
Figures 1 et 2). une adhésiolyse
au laser CO
2
et une vaporisation des foyers d'endométriose
sur l'ovaire et sur l'utérus ont été réalisées, avec prélè-
vement de tissu endométriosique et de la cloison pour
examen anatomopathologique. Celui-ci révèle des kystes
tapissés par un épithélium cylindrique parfois cilié. Le tissu
qui les entoure est très oedématié et non endométrial, la
calrétinine et le CEA sont négatifs et le CA125 est posi-
tif. L'aspect histologique et immunohistochimique est en
faveur d'une ES.
Discussion
Une endosalpingiose a été retrouvée dans 2,4% des cas
après chirurgie de ligature des trompes (3). Dans une
étude rétrospective concernant 51 femmes ayant bénéfi-
cié d'une laparoscopie pour des douleurs pelviennes chro-
niques, 11,8% montrent une ES (4, 5), ce qui est le cas
de la deuxième patiente. Dans une autre étude (6), on a
retrouvé une ES chez 7% des femmes en préménopause
ayant bénéficié d'une coelioscopie.
L'ES est caractérisée par la présence de glandes bordées par
un épithélium tubaire cilié. Elle est d'habitude de décou-
verte fortuite et apparaît souvent en association avec des
néoplasies ovariennes séreuses. Occasionnellement, elle
peut former une masse tumorale (7-9). C'est une affection
bénigne, mais des changements épithéliaux atypiques ont
été rapportés et sont alors appelés «endosalpingiose aty-
pique» (10).
Le diagnostic d'ES est signé histologiquement par la pré-
sence d'un épithélium tubaire contenant trois types de
cellules: les cellules ciliées, les cellules muqueuses sécré-
toires non ciliées et les cellules intercalaires dans une
localisation ectopique. Macroscopiquement, l'ES peut être
composée de simples kystes ou avoir une architecture pa-
pillaire plus complexe. Microscopiquement, les inclusions
de ce dernier type sont associées à des psammomes (11).
Le stroma est non hémorragique.
L'endométriose est, par ailleurs, caractérisée par la pré-
sence de glandes endométriales et de stroma. Ce dernier a
souvent un aspect hémorragique résultant de la réponse
du tissu au stimulus hormonal. Le psammome, quoique
non spécifique à l'ES, n'est pas caractéristique de l'endo-
métriose et peut donc avoir une valeur diagnostique.
Les différentes hypothèses de pathogenèse de l'ES sont si-
milaires à celles de l'endométriose. Cinq théories décrivent
les mécanismes physiopathologiques de l'endométriose:
- transplantation: la muqueuse tubaire est transplantée
au péritoine durant la chirurgie;
- extension directe: l'épithélium tubaire est étendu au
péritoine par les adhérences;
- métaplasie coelomique: les cellules péritonéales coelo-
miques sont pluripotentes et peuvent se différencier
en un épithélium oviducte;
- réactionnel: salpingite avec une prolifération tubaire
excessive durant le processus de réparation;
- métastatique: par diffusion lymphatique.
Ces théories ne sont pas exclusives, d'autres mécanismes
peuvent en être responsables.
L'histoire naturelle de l'ES n'est pas claire, quoique calci-
fication et résorption soient l'issue usuelle. Ceci explique
l'incidence élevée des psammomes associés à la lésion.
Puisque l'ES est rare chez l'enfant et la femme méno-
pausée, on pense qu'elle se développe après la ménarche
et subit une atrophie après la ménopause. En outre, une
Figures 1 et 2: Vues coelioscopiques montrant des
pseudokystes d'endosalpingiose sur le fond et la face
postérieure de l'utérus.