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Le Spécialiste
13-6
10 avril 2013
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L'
Espagne, la Turquie et la Grèce
sont des destinations de vacances
prisées par les Belges. Un bon
nombre de nos concitoyens déci-
dent même de s'y installer définitivement.
Ainsi, selon une étude datant de 2010, plus
de 20.000 secondes résidences espagnoles
appartiendraient à des Belges. Le plaisir de
séjourner ou d'habiter dans ces pays risque
de diminuer s'il faut s'y faire soigner. Depuis
quelques mois, les organismes assureurs
belges reçoivent des factures hospitalières
plus «salées» qu'avant ou doivent intervenir
parce que nos concitoyens sont invités à
payer la quasi totalité du coût des pres-
tations parce que des hôpitaux refusent
la carte européenne d'assurance-maladie
(CEAM). Les établissements de soins espa-
gnols essaient d'obtenir un maximum de
paiements directs des touristes ou des
assureurs étrangers. Ils veulent dépendre le
moins possible des paiements en retard et/
ou injustes effectués par la sécurité sociale
espagnole.
«Aujourd'hui, la situation est
inquiétante»
«Au niveau des mutuelles, nous sommes en
train de nous demander s'il ne faudrait pas
négocier des accords pour les touristes qui
vont en Grèce et en Espagne pour qu'ils conti-
nuent de bénéficier de services de qualité et
abordables et que nous nous ne retrouvions
pas à devoir honorer des factures incroyables»
,
commente Jean Hermesse, secrétaire général
de la Mutualité chrétienne. «L'Etat espagnol
ne contrôle plus les hôpitaux privés, du coup
les patients étrangers ne savent plus ce qu'ils
vont devoir payer. Avant la crise économique,
les touristes belges ne courraient aucun risque
financier. Aujourd'hui, la situation est inquié-
tante.»
Le secrétaire général des Mutualités
libérales, Geert Messiaen, constate qu'en
Espagne et en Grèce, la population est
confrontée à d'importants problèmes car de
nombreux hôpitaux et des pharmacies sont
payés en retard par l'Etat et réclament dès
lors un paiement comptant aux patients.
«Ces problèmes concernent donc aussi les
personnes qui se rendent en vacances dans
ces pays. Nos assurés ne seront pas trop
confrontés à cette problématique, étant
donné qu'en cas d'hospitalisation, Mutas
(une
structure intermutualiste d'assistance inter-
nationale et nationale: NDLR) est contactée.
Il se peut néanmoins que les hôpitaux
refusent la CEAM et que la personne concernée
doive verser une garantie pour l'hospitalisation.
Au vu des énormes problèmes locaux, les
hôpitaux veulent être certains que l'hospita-
lisation sera payée le plus vite possible. S'ils
acceptent la CEAM, ils doivent être rembour-
sés par la caisse espagnole, où il n'y a,
pour le moment, plus d'argent.»
Geert Messiaen précise que sa mutuelle
a déjà été confrontée à ce problème en
Espagne avec un groupe d'hôpitaux publics
qui doit accepter la CEAM mais la refuse et
demande une garantie de Mutas. «L'Inami a
été mis au courant, mais les résultats de
l'intervention ne donnent pas grand-chose
pour le moment. Cette problématique trouve
son origine dans le fait que de plus en plus
d'hôpitaux publics laissent gérer leur
administration par des tiers (par exemple
le groupe Gestitursa). Ces institutions
n'acceptent plus la CEAM à partir du moment
où ils savent qu'un assureur tiers est impliqué.
Gestitursa
(bureau d'encaissement et de fac-
turation qui gère des hôpitaux en Espagne, au
Portugal, en Turquie et en Roumanie: NDLR)
considère également Mutas comme une assu-
rance tiers privée et souhaite toujours une
garantie de paiement de notre part. Après
concertation avec les unions nationales et les
autres centrales d'alarme (tant en Belgique
qu'à l'étranger), il a été décidé de ne pas
fournir de garantie.»

Le patron des Mutualités libérales souligne
que cette situation entraîne parfois des
problèmes pour les patients concernés.
Les régions touristiques sous
pression
En outre, dans plusieurs régions d'Espagne, les
résidents belges, ne peuvent plus se procurer
gratuitement leurs médicaments. «Les patients
doivent les payer eux-mêmes et examiner ensuite
avec leur mutualité s'ils ont droit à un rembourse-
ment. Ces pratiques nous sont surtout signalées
dans les régions touristiques, où la sécurité sociale
est considérablement sous pression.»
Selon Geert Messiaen, l'Espagne répartirait
les moyens financiers pour les soins aux
étrangers de manière proportionnelle entre
toutes les provinces/régions. «Un partage
que les établissements de soins situés dans les
régions touristiques considèrent comme très
injuste, car dans ces régions il y a évidemment
beaucoup plus de touristes ayant besoin de
soins que, par exemple, à l'intérieur du pays.»
«L'Espagne a décidé que les pensionnés belges
qui séjournent là-bas ne sont plus couverts
que pour les soins urgents. Les soins pour des
maladies préexistantes ou des petits soins ne
sont plus couverts. Le citoyen belge doit d'abord
avancer l'argent puis se faire rembourser en-
suite par sa mutuelle. C'est contraire au principe
européen de la libre circulation des personnes»
,
précise Christian Horemans, expert affaires
internationales aux Mutualités libres.
Tarifs plus élevés
Dans les régions touristiques, les hôpitaux privés
sont plus nombreux que les hôpitaux publics.
Ils demandent souvent des tarifs plus élevés aux
touristes. Parfois le triple de ceux adressés aux
Espagnols. «De plus, en raison des problèmes que
connaissent les hôpitaux publics espagnols (liste
d'attente, qualité...), les hôpitaux privés sont
également fort sollicités par la population espa-
gnole»
, ajoute Christian Horemans.
Les Mutualités libres essayent actuellement
de signer des conventions avec des groupes
hospitaliers turcs pour qu'ils respectent des
tarifs «normaux». «Des abus sont signalés par
notre centre d'alarme. Evidemment, le plus
important pour nous est que nos membres se
fassent bien soigner sur place. Il revient ensuite
à l'organisme assureur de régler les pro-
blèmes administratifs. L'aspect financier doit
être le problème de la mutuelle, pas celui du
patient.»
Les organismes assureurs veulent
néanmoins régler le problème à la source,
via des conventions, afin d'éviter de devoir
régler les contentieux à distance.
Vincent Claes
JS0487F
Il vaut mieux ne plus tomber malade en Espagne
Plusieurs mutuelles s'inquiètent des conséquences de la crise
financière sur les factures hospitalières et le remboursement des
soins délivrés en Espagne, en Turquie et en Grèce à des touristes ou
résidents belges. Les organismes assureurs ont averti l'Inami.
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Les établissements de soins
espagnols essaient d'obtenir un
maximum de paiements directs
des touristes ou des assureurs
étrangers.
L'Espagne a décidé que les pensionnés belges qui séjournent là-bas ne sont plus
couverts que pour les soins urgents.