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I
Le Spécialiste
13-6
10 avril 2013
www.lespecialiste.be
O
n ne reviendra pas ici sur les
manifestations cliniques et
les modalités diagnostiques
des symptômes du bas appareil urinaire
masculin, largement évoquées dans les
recommandations de l'EAU (1) et de l'AUA
(2), si ce n'est pour évoquer l'importance
de l'évaluation du risque de progression,
de complications, d'efficacité et d'effets
secondaires des traitements disponibles.
Et ceci est à considérer dans le cadre de
ce qui est incontestablement une maladie
d'évolution progressive, qui peut s'enflammer
à tout moment du fait d'affections
intercurrentes (3) et qui se marque
également chez l'homme normal par un
déclin annuel de 2,1% du débit urinaire (4)
et une augmentation annuelle de 2,2% du
volume prostatique (5).
«Dans ce cadre, il est utile, avant de proposer
un traitement, d'évaluer l'importance des
symptômes (score IPSS)
», remarque Truls
Bjerklund Johansen (Tromsö, Norvège),
«d'effectuer un toucher rectal, un examen
des urines et un dosage du PSA et de la
créatininémie, sans oublier la mesure du
débit et du résidu mictionnel (1)»
. Ce n'est
qu'en cas de score IPSS > 8 qu'un traitement
médical sera proposé (avec chirurgie si
nécessaire lorsque le score est > 19).
Plusieurs options médicales s'offrent à
l'urologue: alphabloquants, inhibiteurs de la
5-alpha réductase (5ARI), antagonistes des
récepteurs muscariniques, extraits de plante,
desmopressine, combinaisons thérapeutiques
(alphabloquant + 5ARI ou antagoniste
des récepteurs muscariniques, et tout
récemment, les inhibiteurs de la PDE5 avec
ou sans alphabloquant). Mais ces options
ne peuvent se concevoir sans éducation
du patient ni en l'absence de respect d'une
hygiène de vie comportant la réduction des
apports liquidiens, l'abstention d'alcool et
de caféine et l'entraînement vésical (1b, A),
sans oublier de traiter la constipation le cas
échéant.
Les alphabloquants (terazosine, doxazosine,
alfuzosine, tamsulosine, ces deux derniers
semblant mieux tolérés) améliorent les
symptômes de 30 à 45% et le Qmax
de 15 à 30% (1a, A) au prix, parfois, de
troubles éjaculatoires. La silodosine, plus
sélective pour les alpha1b démontre un
taux un peu plus important de troubles
éjaculatoires mais sans effets secondaires
cardiovasculaires. Pour les 5ARI (finastéride,
dutastéride), l'effet est plus lent mais se
marque aussi par une réduction du volume
prostatique de 15-25% à 6 mois avec
réduction de 50% du taux de PSA. Les 5ARI
doivent donc être proposés aux hommes
avec prostate manifestement augmentée
de volume (1b, A) et peuvent être associés
utilement aux alphabloquants (1b, A).
Autre association intéressante, la
combinaison d'un alphabloquant et d'un
anticholinergique a également fait ses
preuves en cas d'échec d'un alphabloquant
seul (1b, B) et en cas de symptômes de type
obstructif (2b, B).
Quant aux inhibiteurs de la PDE5, il s'agit
probablement de la solution d'avenir,
certainement en cas de dysfonction érectile
associée (1b). Enfin, en cas de nycturie, la
desmopressine a démontré des résultats
intéressants. Reste alors la problématique des
extraits de plantes dont la diversité n'a pas
permis au Comité des recommandations de
retirer des conclusions péremptoires.
Raffermir la relation sexuelle
Pour la dysfonction érectile, dont on
connaît les relations étroites avec le risque
cardiovasculaire (6), la première mesure
est certainement de prendre en charge
efficacement les facteurs de risque: obésité,
sédentarité, hypertension artérielle, diabète,
dyslipidémie... (1, A). Cependant, la majorité
des antihypertenseurs (bêtabloquants
et thiazides) augmentent le risque de
dysfonction érectile (de 20% environ)
à l'exception notable des sartans qui
l'améliorent (7). Pour les statines, on sait par
ailleurs qu'elles améliorent la dysfonction
érectile lorsque la dyslipidémie est isolée (8).
Elles améliorent aussi l'efficacité du sildénafil
en cas de non-réponse (9). Réduire l'obésité
(10) et augmenter l'activité physique (11)
agissent également positivement sur la
fonction érectile.
Une fois ces précautions prises, les inhibiteurs
de la PDE5 sont le traitement de base de
la dysfonction érectile (1, A) (12). Leur
efficacité et leur tolérance étant relativement
similaires, le choix se portera selon la
préférence du patient, 70% d'entre eux
optant pour la prise journalière de manière à
conserver une certaine spontanéité.
Cela dit, selon les pathologies sous-jacentes,
20-60% des patients n'obtiennent pas les
résultats escomptés. A ces patients, on proposera
alors d'augmenter les doses progressivement
jusqu'à la dose maximale autorisée, de modifier
l'horaire des prises, de prendre l'inhibiteur de la
PDE5 à jeun, de combiner avec de la testostérone
en cas d'hypogonadisme avéré (1, A) (6) ou,
lorsque toutes ces mesures ont été tentées ou
proposées, de passer aux traitements alternatifs
(injections intracaverneuses, intra-urétrales,
prothèse, etc.) qui n'ont pas été débattus ici.
Dr Dominique-Jean Bouilliez
Références
1. Oelke M, et al. http://www.uroweb.org/guidelines/
online-guidelines/
2. McVary K, et al. J Urol. 2011;185(5):1793-803.
3. Emberton M, et al. BJU Int. 2008;102(8):981-6.
4. Roberts R, et al. J Urol. 2000;163(1):107-13.
5. Lieber M, et al. BJU Int. 2010;105(2):214-9.
6. Jackson G, et al. Int J Clin Pract. 2010;64(7):848-57.
7. Baumhäkel M, et al. Int J Impot Res. 2008;20(5):493-
500.
8. Saltzman E, et al. J Urol. 2004;172(1):255-8.
9. Herrmann H, et al. J Sex Med. 2006;3(2):303-8.
10. Esposito K, et al. JAMA. 2004;291(24):2978-84.
11. Maio G, et al. J Sex Med. 2010;7(6):2201-8.
12. Eardley I, et al. J Sex Med. 2010;7(1 Pt 2):524-40.
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TH
ANNUAL EUROPEAN ASSOCIATION OF UROLOGY CONGRESS, MILAN, 15-19 MARS 2013
Un peu du quotidien
Quelles que soient les nouveautés présentées, l'EAU se caractérise chaque année par la qualité de ses sessions éducationnelles. Organisées
par l'ESU, elles couvrent le champ quasi complet de l'urologie, en ce compris les problèmes au quotidien. De quoi évoquer l'hypertrophie
bénigne de la prostate et la dysfonction érectile et revenir sur les fondamentaux de la thérapeutique.
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