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7
l
Neurone
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Vol 18
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N°7
·
2013
ACTUA
ALCOOLISME
a
bstinence
totale
ou
réduction
progressive
?
a
u
cas
par
cas
ll est temps de réduire le risque de la maladie alcoolique, et pas uniquement la
maladie en elle-même, signalait un éditorial récent de Addiction (1). C'est en ces
termes que le Professeur Philip Gorwood (Ste-Anne, Paris) abordait la nécessité
de modifier le paradigme de prise en charge de l'alcoolisme maintenant que
nous savons que l'abstinence n'est plus le gold standard. Il existe en effet un
continuum entre consommation dommageable et assuétude, un continuum qu'il
faut pouvoir assumer en tant que thérapeute. Résumé de la session consacrée à
ce phénomène de société au cours du congrès annuel de l'European Psychiatric
Association à Nice le 8 avril 2013.
«Peut-on se satisfaire de la procédure actuelle qui ne propose de traitement que pour
la dépendance à l'alcool? En d'autres termes, devons-nous nous focaliser sur les 15
millions de personnes dépendantes à l'alcool dans l'Union européenne, et pour
lesquelles on sait que 10% seulement bénéficient d'un traitement (les 2/3 rechutent
endéans les 12 mois)? Ou devons-nous étendre nos préoccupations?»
Cette question,
posée par Philip Gorwood, mérite réflexion car il n'y a pas que la dépendance en
elle-même, mais aussi les effets toxiques généraux de l'alcool (2). Or peu de patients
recourent aux soins dans cette situation, comme l'ont démontré deux études récentes
aux résultats semblables: 7,0-7,3% des patients avec problèmes liés à l'alcool ont eu
recours à des soins (3). «Il nous faut donc modifier la manière de détecter ces patients
et de les traiter»
, poursuit le spécialiste parisien.
Par ailleurs, si on sait que 30% des patients traités par acamprosate sont toujours
abstinents après 12 mois de traitement et que 2/3 des patients traités par naltrexone
ont rechuté au moins un jour, et de manière conséquente, au cours des 16 semaines
de traitement, on sait aussi que l'obtention d'une rémission à 12 mois garantit une
rémission complète à 85,7% d'entre eux après 3 ans (5,1% de rechutes). Mais des
études récentes ont également montré que la réduction de la consommation d'alcool
est un pas important et plus sûr vers l'abstinence (5), celle-ci devenant plutôt un
objectif de seconde intention, «un concept que les rédacteurs du DSM-5 ont largement
avalisé»
, poursuit Gorwood.
Traiter tôt
La relation cancer/absorption d'alcool est linéaire, quel que soit le cancer considéré.
C'est dans ce cadre qu'il faut accueillir le constat que la motivation à l'arrêt à travers des
informations spécifiques permet de réduire de manière substantielle la consommation,
et donc le risque (7). La substitution est l'un de ces outils, un outil qui a fait ses preuves
dans d'autres pathologies addictives: l'utilisation de méthadone réduit en effet non seu-
Dominique-Jean Bouilliez
N1953F