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l
Neurone
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Vol 18
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N°7
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2013
NOUVEAUTES EN GENETIQUE
N1929F
Introduction
D'ici à 2030, 66 millions de personnes seront atteintes de démence dans le monde et
115 millions d'ici à 2050 (2). La maladie d'Alzheimer (MA) est la principale cause de
démence chez les seniors. Sur le plan clinique, une distinction est effectuée entre les
formes à début précoce (avant 65 ans) et tardif (après 65 ans), qui ont chacune leur
composant génétique. D'un point de vue pathologique, la maladie est caractérisée
par des caillots dans des lésions cérébrales caractéristiques [amas de protéines A
(bêta-amyloïdes) et tau (MAPT)] (3).
Des anomalies héréditaires (mutations) au niveau de 3 gènes impliqués dans la pro-
duction amyloïde déclenchent la maladie à un jeune âge. Hormis dans quelques
familles où la MA est transmise de manière autosomique dominante, le mode d'héré-
dité chez la plupart des patients est inconnu et la maladie est causée par toute une
série de petites anomalies dans l'ADN (variantes) qui, combinées à des facteurs envi-
ronnementaux, augmentent le risque de démence (= contexte génétique complexe).
Des études sur des jumeaux ont démontré que la part héréditaire (= la part imputable
à des mutations de l'ADN) de la forme tardive s'élève à 80% (4). Des mutations dans
un quatrième gène, APOE, ont été identifiées comme facteur de risque de la MA.
Grâce aux avancées technologiques des études d'association pangénomiques à
grande échelle (GWA ­ genome-wide association), qui permettent de déterminer des
millions de mutations sur le génome, plus de 9 nouveaux gènes à risque ont été dé-
couverts pour la forme tardive de la maladie d'Alzheimer (5-9). Ces gènes ont permis
de mettre au jour plusieurs processus pathologiques, tels que le métabolisme
lipidique, le système immunitaire et la fonction synaptique.
Bien d'autres gènes prédisposants pourront être découverts en combinant les résultats
de l'ensemble des études GWA sur la maladie d'Alzheimer (= méta-analyse). Les
technologies NGS (Next-Generation Sequencing) ont le potentiel de détecter les mu-
tations prédisposantes et causales. Elles peuvent être appliquées dans les petites
familles et sur les patients sans lien de parenté pour lesquels la cause génétique est
inconnue (Figure 1). Ces progrès ont d'importantes implications cliniques tant sur la
collecte du matériel biologique d'un patient que sur le diagnostic génétique.
Karolien Bettens
1,2
, Kristel Sleegers
1,2
et Christine Van Broeckhoven
1,2
1. Groupe des Pathologies cérébrales
neurodégénératives, Département de
Génétique moléculaire, VIB, Antwerpen
2. Laboratoire de Neurogénétique, Institut
Born-Bunge, Universiteit Antwerpen
l
a
génétiQue
de
la
maladie
d
'a
lzheimer
:
bilan
Lors des recherches consacrées à de nouveaux gènes impliqués dans la maladie
d'Alzheimer (MA), les études de liaison classiques et études d'association autour
de gènes candidats sont de plus en plus remplacées, d'une part, par le séquen-
çage de l'«exome» ou du «génome» (pour les formes héréditaires mendéliennes
de la MA) et, d'autre part, par l'exécution d'études d'association pangénomiques
(pour les formes non mendéliennes de la MA). L'identification de nouveaux gènes
prédisposants pour la MA débouche sur de nouvelles pistes concernant les méca-
nismes sous-jacents de la maladie. Tandis que les populations d'étude à grande
échelle ont permis d'identifier de nouveaux facteurs de risque, le séquençage de
quelques patients a déjà permis de faire certaines découvertes.
Ce glissement théorique vers des études translationnelles et le séquençage de
l'individu place le patient et son matériel biologique à l'avant-plan des études
génétiques. Ce recentrage sur le patient individuel nécessite l'implication et une
étroite collaboration des neurologues cliniques (1).